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Gestion problématique des données personnelles par les services secrets

29.07.2009

Il y a près d’un an, en juin 2008, avait été révélé que les services secrets suisses ont dressé en peu de temps 110'000 fiches. L’organisation Droitsfondamentaux.ch a qualifié cette affaire de « deuxième affaire des fiches ». Les personnes qui ont demandé à inspecter leurs fiches ont vu leurs demandes systématiquement refusées. Il semblerait d’ailleurs que les services secrets ne se contentent pas de récolter des données sur des citoyens intègres, mais ils les ont également transmis à des services secrets étrangers. Le préposé fédéral à la protection des données et à la transparence (PFPDT), Hanspeter Thür, considère cette situation de « très préoccupante », d’autant plus que des suppositions et des données non-vérifiées ont également été transmises.

Les services secrets nationaux envoient en moyenne 30 données par jour à d’autres services secrets étrangers, selon le Tages-Anzeiger du 15 juin 2009. Selon ses recherches, le Service pour l’analyse et la prévention (SAP), qui correspond aux services secrets helvétiques, transmet de plus en plus de données à d’autres services secrets. Ce que ces derniers en font échappent manifestement au SAP. Celui-ci a, selon le Tages-anzeiger, livré des informations au sujet du parlementaire bâlois Mustafa Atici (PS) à un service étranger, avant d’effacer ses propres données. Dans le même registre, il est apparu le 10 juin 2009, que la défenseuse bâloise des droits humains Anni Lanz a été fichée à plusieurs reprises depuis 1998, sur demande d’un service secret étranger.

Les antécédents

Au début de l’été 2008, le public avait pris connaissance de plusieurs affaires de fiches constituées par le SAP. Dans un cas, le PFPDT avait confirmé à Droitsfondamentaux.ch que le SAP, dans le cadre des manifestations anti-WEF du 19 janvier 2008 à Berne, avait fiché deux personnes ainsi qu’une organisation. Pour les autres cas, les médias ont rapporté l’établissement des fiches de Bâle. La Commission d’examen des prestations (CEP) du canton de Bâle-Ville s’était heurtée à des cas d’espionnage au sujet des politiciens d’origine turc. Apparemment en 2004, suite au conflit kurde en Turquie six parlementaires du Grand Conseil bâlois d’origine turque auraient été fichés par le service de renseignement suisse. Début juillet 2008, la télévision suisse-alémanique rapportait le cas d’un Bâlois d’origine kurde dont la naturalisation a été refusée en raison d’entrées à son sujet dans le registre de protection de l’Etat. Le fichage des Kurdes avaient à l’époque été effectué en raison de leur implication dans des manifestations ou d’autres événements au sujet de la question kurde.

L’enquête prend du retard

Dans son rapport annuel 2008, la CEP bâloise se déclarait alarmée par le comportement des services secrets et par son silence. La commission cantonale a pris contact avec la délégation d’examen des prestations du Conseil national et du Conseil des Etats (GPDel). Le conseiller aux Etats bâlois et membre de la GPDel, Claude Janiak (BL/SP), a certifié que la commission parlementaire de surveillance allait se pencher sur l’affaire des 11'000 fiches. La loi sur la sûreté intérieure, actuellement en pleine révision, n'autorise la collecte de données – le «fichage» – qu'en cas de soupçon fondé de terrorisme ou d'espionnage. En autonme 2008, l’ONG  Droitsfondamentaux.ch rapportait que la recherche par la GPDel n’était pas encore terminée et qu’elle avait pris du retard. Les demandes de recherches dans la base de donnée de l’Etat faites à la confédération par des personnes privées et des organisations n’ont pour l’instant été répondue que par une « lettre type de refus ». Deux recherches en vue d’augmenter les vérifications des procédures de fichages ont été rejetées par l’administration fédérale.

Interpellation parlementaire

En septembre 2008, la conseillère aux Etats bâloise Anita Fetz (BS/PS) déposait une interpellation demandant au Conseil fédéral de prendre position sur cette affaire. Celui-ci a commencé par répondre que les organes de sûreté de la Confédération et des cantons en ce qui concerne le traitement des données « ne sont pas autorisés à traiter des informations relatives à l'engagement politique ou à l'exercice des droits découlant de la liberté d'opinion, d'association et de réunion », sauf en cas de « présomption sérieuse » de préparation ou exécution « d'actes relevant du terrorisme, du service de renseignements ou de l'extrémisme violent ». Le Conseil fédéral a parlé de l’enregistrement de données relatives à la protection de l'Etat de 13 000 personnes domiciliées en Suisse. Il a ajouté qu’il est interdit de publier des informations concernant des personnes figurant dans ce système, et que la loi ne fait pas d'exception pour les parlementaires.

  • Députés bâlois d'origine turque fichés: la Confédération devra s'expliquer (n'est plus accessible en ligne)
    Le Temps, vendredi 27 juin 2008

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