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L’assistance judiciaire gratuite dans le droit d’asile

29.09.2015

Le Comité des droits de l’homme et le Comité contre la torture des Nations Unies ont fait, en 2009 pour l’un et 2010 pour l’autre, des recommandations similaires à la Suisse concernant l’assistance judiciaire gratuite dans le cadre de la procédure d’asile. Il en ressort que: «l’État partie devrait revoir sa législation de façon à accorder gratuitement l’assistance d’un avocat aux demandeurs d’asile pendant toutes les procédures, qu’elles soient ordinaires ou extraordinaires».

Conditions générales préalables améliorées

Avec l’introduction de l’art. 110a LAsi sur l’assistance judiciaire dans le cadre de la nouvelle révision de la loi sur l’asile en 2012, cette recommandation a en partie été appliquée, améliorant ainsi considérablement la protection juridique des demandeurs/demandeuses d’asile. Il est en effet possible de désigner, sur demande, une défense d’office notamment en cas de plainte contre les décisions de rejet pour raisons de forme, lors d’un refus d’une demande d’asile et dans le cadre des décisions d’expulsion (art. 110a al. 1 LAsi). Pour pouvoir bénéficier de la défense d’office gratuite, il faut cependant  d’une part que les demandeurs/demandeuses satisfassent la  condition de l’insuffisance des moyens d’existence, autrement dit qu’ils/elles soient reconnu-e-s comme étant dans une situation d’indigence, et d’autre part que leur cause ne soit pas dépourvu de chance de succès. 

Comme le confirme l’avocat zurichois Peter Frei, l’amélioration de la protection juridique est telle que la représentation judiciaire gratuite est autorisée dans la plupart des cas. Font exception à l’art. 110a al. 1 LAsi, les recours déposés contre les décisions dans le cadre de procédures Dublin, de demandes de réexamen, de révision et de demandes multiples (art. 110a al. 2 LAsi). Frei rappelle en effet que les décisions prises dans le cadres des renvois Dublin s’accompagnent souvent, pour des raisons d’absence de motifs valables (inefficacité de moyen), d’un rejet des demandes d’assistance gratuite: «Dans ce domaine, l’octroi de l’assistance judiciaire gratuite se réduit à un jeu de lotterie et dépend avant tout du juge compétent dans l’affaire en cause».

Mise en œuvre insuffisante

Dans la pratique, l’assistance judiciaire gratuite est cependant rarement sollicitée dans le droit d’asile. Cela montre que l’amélioration du  cadre juridiquen’a pour l’instant pas été suivie des mesures concrètes appropriées. Pour des raisons linguistiques ou d’autres problèmes de compréhension, les demandeurs/demandeuses d’asile n’ont souvent pas connaissance de leurs droits. En outre, le nombre d’avocat-e-s spécialisé-e-s dans le domaine de l’asile et dans le droit des étrangers est encore trop restreint pour satisfaire au nombre des demandes potentielles. Les améliorations opérées dans la loi ne se sont pas encore traduites par une augmentation du personnel compétent dans les différents services de consultations juridiques (ONG et œuvres d’entraide). Pour assurer l’effectivité de la protection juridique, une consultation juridique et une représentation juridique automatiques financées par l’Etat et indépendantes doivent être mises sur pied, à l’image de la procédure accélérée en phase de test à Zurich (art. 23 Ordonnance sur les phases de test).

Détention administrative

Dans le domaine de la détention administrative, le Tribunal fédéral a précisément statué lors de la procédure relative à la prolongation de la détention, que l’on ne peut refuser de façon générale à une personne incarcérée sans ressource après trois mois de détention, l’octroi d’un conseil juridique gratuit sur demande. Cette affirmation est à considérer indépendamment des chances de succès du procès. Dans le domaine de la détention administrative, le droit fondamental à l’assistance judiciaire gratuite demeure néanmoins fortement limité. Le recours à une consultation juridique depuis la prison n’est en effet pas aisé pour les détenu-e-s. La prestation gratuite d’assistance d'un avocat d’office ne couvre pas le simple travail de consultation et les bureaux de consultation juridique sont géographiquement hors de portée de celles et ceux qui se trouvent dans un établissement fermé.. En outre, les personnes détenues dans les prisons n’ont souvent aucune liste d’avocat-e-s à disposition.