29.06.2015
En cette Journée internationale de soutien aux victimes de la torture, l’ACAT-Suisse (Action des chrétiens pour l’abolition de la torture), TRIAL (Track Impunity Always) et Humanrights.ch ont remis 7000 signatures au Conseil fédéral, lui demandant d’intégrer le crime de torture au Code pénal. À ce jour, l’application des dispositions de la Convention internationale contre la torture reste en effet inachevée.
Absence d’incrimination globale de la torture
La Suisse est partie depuis 1987 à la Convention des Nations Unies contre la torture (CAT), qui définit la torture et prévoit une base légale pour la prévention, la poursuite en justice et la sanction des actes de torture. Or à ce jour, la législation pénale suisse ne contient pas d’incrimination globale de la torture. Le Code pénal suisse incrimine les actes de torture qualifiés de crimes contre l’humanité ou d’infractions graves aux Conventions de Genève, mais ne les réprime pas s’ils sont commis dans d’autres contextes. S’il est vrai que le Code pénal prévoit des dispositions juridiques relatives aux infractions contre la vie et l’intégrité corporelle, aux crimes et délits contre la liberté ou aux infractions contre l’intégrité sexuelle, ces normes ne couvrent pas tous les aspects de la notion de torture. De plus, les sanctions prévues pour ce genre d’infractions ne sont pas à la hauteur de la gravité du crime de torture et risquent de ne pas avoir d’effet dissuasif. En bref, l'introduction du crime de torture permettrait à la Suisse de poursuivre les actes de torture qui ne tombent actuellement sous le coup d'aucune disposition pénale suisse, et ce quels que soit le lieu où ils ont été commis, ainsi que la nationalité de leurs auteurs et de leurs victimes.
Plus de protection contre la torture
En avril dernier, la Cour européenne des droits de l’homme (CrEDH) a condamné l’Italie pour avoir violé l’article 3 de la CEDH relatif à l’interdiction de la torture. Le plaignant, Arnaldo Cestaro, a été la cible de violences policières aggravées alors qu’il manifestait lors du sommet du G8 à Gênes en juillet 2001. Selon la CrEDH, les graves violations qu’il a subies équivalaient à de la torture. Or ces attaques sont restées impunies. La législation pénale italienne ne prévoyant ni définition ni sanction pour de tels actes. Le 7 avril 2015, la Cour a rendu un arrêt décisif, condamnant l’Italie pour avoir violé l’article 3 de la CEDH, non seulement à cause des mauvais traitements subis par Arnaldo Cestaro, mais aussi pour sa législation pénale inadéquate en matière de sanction de la torture.
La Suisse, jusque-là bonne élève de la CEDH, pourrait elle aussi se faire condamner en raison de l’absence d’une incrimination de la torture. Afin que la Suisse puisse rester un exemple en matière de démocratie, il est impératif qu’elle introduise dans son Code pénal le crime de torture et prévoie des sanctions adéquates.
Recommandations de la Commission contre la torture
Par ailleurs, la Suisse sera examinée par le Comité des Nations Unies contre la torture fin juillet. Cette grave lacune dans son Code pénal fera à nouveau l’objet d’une recommandation, à laquelle la Suisse devra répondre.
Sources
- L’ACAT, TRIAL et Humanrights.ch demandent l’intégration du crime de torture au Code pénal suisse (pdf, 1 p.)
Communiqué de presse, 26 juin 2015