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Refus d’inscrire le partenaire enregistré en tant que père d’un enfant né d’une mère porteuse

08.06.2015

Le partenaire enregistré du père biologique d’un enfant né en Californie d’une mère porteuse ne peut se faire enregistrer en tant que parent de l’enfant dans le registre de l’état civil suisse. La reconnaissance de l’inscription américaine de ce dernier en qualité de père de l’enfant est effectivement incompatible avec l’ordre public suisse, à savoir l’ordre des valeurs juridiques et éthiques prévalant en Suisse. C’est ce qui ressort d’un arrêt du Tribunal fédéral de mai 2015. L’interdiction de la gestation pour autrui est ancrée dans la Constitution fédérale (art. 119, 2 b Cst.). Le Tribunal fédéral admet  donc le recours du Tribunal administratif de l’Office fédéral de la justice (OFJ) et conteste la paternité de l’homme n’ayant aucun lien biologique avec l’enfant.

L’arrêt du Tribunal fédéral annule la décision prise par les autorités compétentes du canton de St. Gall, où la couple est domicilié. Le Département de l’intérieur du canton de St. Gall avait approuvé l’inscription des deux hommes en qualité de pères dans le registre de l’état civil. Le recours de l’OFJ contre cette décision avait été rejeté par le Tribunal administratif du canton de St. Gall en août 2014.

L’Arrêt du Tribunal fédéral relatif à cette affaire (Arrêt 5A_748/2014) sera publié prochainement.

Critique de l’association Familles arc-en-ciel Suisse

L’association Familles arc-en-ciel Suisse a réagi de manière critique à cette décision du Tribunal fédéral qui, à son avis, ne fait que confirmer la nature contradictoire de la législation suisse en matière de droit familial. En plus, elle craint que la décision d’enregistrer uniquement le père biologique de l’enfant, puisse avoir des conséquences négatives sur la vie de la famille en question.

La sentence du Tribunal fédéral touche à un sujet qui gagne toujours plus d’ampleur. C’est un fait que les couples suisses ont toujours plus souvent recours à des techniques de procréation assistée dans leur pays ou à l’étranger. En Suisse, d’après l’association, presque 30'000 enfants vivent et grandissent dans des familles arc-en-ciel.

Extrait du Communiqué aux médias du Tribunal fédéral

«La reconnaissance de l'inscription américaine de ce dernier (le partenaire) en qualité de père est fondamentalement incompatible avec les jugements de valeur juridique et éthique prévalant en Suisse (ordre public). En Suisse, toutes les formes de gestation pour autrui sont interdites par la Constitution. Cette interdiction fait office de fondement et de noyau dur de la conception juridique locale. Le jugement californien a pour effet de créer de par la naissance un lien juridique avec le «père» n'ayant aucun lien biologique avec l'enfant, ce qui serait impossible en Suisse. Dans la mesure où la décision américaine présente certaines similitudes fonctionnelles avec l'adoption, il convient de rappeler que celle-ci serait exclue en Suisse, dès lors que le droit suisse applicable n'autorise pas l'adoption des enfants du partenaire enregistré. En l'espèce, le Conseil fédéral propose certes une modification. Il appartient toutefois au législateur et non au Tribunal fédéral d'évaluer les mesures qui s'imposent dans ce domaine.

Dans le cadre d'une adoption, l'ordre public suisse exigerait en outre un examen d'aptitude de la personne désireuse d'adopter. Il convient de surcroît de tenir compte du fait que le seul lien des deux partenaires enregistrés avec les Etats-Unis réside dans le fait d'avoir contourné dans ce pays l'interdiction d'avoir recours à une mère porteuse prévalant en Suisse. Il n'existe aucune autre attache avec les Etats-Unis tels que le domicile ou encore la nationalité américaine. Le rejet de la réquisition d'inscription d'un deuxième père est finalement également compatible avec la jurisprudence de la Cour européenne des droits de l'homme. Elle ne fait naître aucune insécurité juridique pour l'enfant du point de vue de son droit à une filiation et à une vie familiale prévu par l'art. 8 de la Convention européenne des droits de l'homme. Le père biologique est connu et, du fait du lien de filiation qui le lie à l'enfant, la possibilité pour ce dernier de demeurer en Suisse et au sein de la famille en question est également garantie. Le Tribunal fédéral tranche la présente cause en tenant compte des circonstances particulières du cas d'espèce. Il laisse ouverte la question de savoir si une appréciation différente serait indiquée dans d'autres situations».

L’intérêt supérieur de l‘enfant

Dans un article publié peu avant la sentence du Tribunal fédéral, le Centre suisse de compétence pour les droits humains (CSDH) s’est penché sur le sujet de la maternité de substitution, en essayant de l’analyser depuis la perspective des droits de l’enfant. Contrairement à la prise de position du Tribunal fédéral, le CSDH estime qu’une ingérence dans la vie familiale entre les parents d’intention et l’enfant né d’une mère porteuse n’est licite que lorsque le bien de l’enfant est en danger. Une violation de l’ordre public n’est en ce sens pas un argument recevable.

Sources