01.09.2022
La protection des droits humains en Asie du Sud-Est est encore une jeune construction fragile en comparaison avec les autres systèmes régionaux. Les États de cette région veillent à ne pas se mêler des affaires de leurs voisins ou à ne pas les stigmatiser. Ce souci amoindrit considérablement l’autorité des organes régionaux de protection des droits humains auprès des États. Malgré les lacunes de l’accord sud-asiatique sur les droits humains et son manque d’effectivité, les dernières évolutions représentent un premier pas vers un système régional général pour la protection des droits humains.
Le respect des droits humains dans les pays d’Asie du Sud-Est est sous le contrôle des organismes institutionnels ci-dessous.
L’Association des nations d’Asie du Sud-Est
L’Association of Southeast Asian Nations (ASEAN) est une organisation internationale, composée d‘États d’Asie du Sud-Est, dont le siège se trouve à Jakarta. Créée en 1967, cette organisation vise à encourager la croissance économique, le développement social et culturel ainsi que la paix dans la région. Les États membres y recourent principalement pour échanger et dialoguer. Sa compétence ne s’étend donc pas assez pour s’immiscer dans leurs affaires. Pour garantir la souveraineté absolue des États, la prise de décision est consensuelle, de sorte qu’aucune décision ne puisse être imposée à un État.
Les chef·fe·s d’États et de gouvernements se rencontrent deux fois par an à l’occasion du sommet de l’ASEAN. Constituant le plus haut organe de l’organisation, l’Assemblée prend toutes les décisions et décide de la politique de l’ASEAN.
Lors d’un des sommets de 2012, elle a adopté sa charte sur les droits humains (ASEAN Human Rights Declaration ou AHRD). En raison de la faible protection des droits humains qu’elle prévoit, l’AHRD a été vivement critiquée par le Haut-Commissariat des Nations Unies aux droits de l’homme (HCDH) et par la société civile internationale.
La commission intergouvernementale asiatique pour les droits humains
L’Asean intergovernmental Commission on Human Rights (AIHCR) a été créée en octobre 2009 pour conseiller l’ASEAN, qui l’a mandaté pour retravailler l’AHRD.
L’AIHCR a ainsi survécu à la ratification de la Charte sur les droits humains et s’assure désormais de sa mise en œuvre. La commission est constituée d’un·e représentant·e de chacun des dix pays membres de l’ASEAN et son fonctionnement est régi par la règle du consensus. Le véto d’un·e membre de la commission peut donc largement bloquer une décision de la commission.
Le mandat de l’AIHCR consiste à promouvoir et à défendre les droits humains, tels qu’ils sont inscrits dans l’AHRD. Les principales activités de la commission sont la sensibilisation, le développement de compétences dans le domaine des droits humains, le conseil d’États membres et l’établissement d’un rapport annuel pour l’ASEAN.
La commission manque d’instruments efficaces pour relever et sanctionner les violations des droits humains. Aucune procédure de contrôle n’est prévue et aucune visite sur le terrain n’est réalisée. Depuis 2012, l’AIHCR reçoit des plaintes individuelles, mais nombreuses sont celles qui se perdent dans la masse. Malgré le peu de compétences dont elle dispose par rapport aux autres commissions pour les droits humains, l’AIHCR parvient néanmoins à contribuer à la promotion des droits humains. Pour remplir pleinement le mandat qui lui a été attribué, la commission manque cependant d’autorité.
Le manque d’instruments efficaces pour protéger les droits humains ainsi que les lacunes de l’AHRD sont d’une part dus au principe de non-ingérence entre les États membres de l’ASEAN et à l’importance accordée à la souveraineté dans l’organisation de l’Asie du Sud-Est. D’autre part, un accord sur les obligations en matière de droits humains et sur leur caractère obligatoire fait également défaut à l’organisation.
D’autres institutions pour les droits humains en Asie du Sud-Est
La commission de l’ASEAN pour la promotion et la protection des droits des femmes et des enfants (ACWC) est similaire à l’AIHCR et assiste les commissions de l’ONU dans leur mission de suivi des droits des femmes et des enfants dans les pays d’Asie du Sud-Est.
Le comité de l’ASEAN pour la protection des droits des travailleur·euse·s migrant·e·s a été créé pour appliquer la Déclaration de l’ASEAN relative à la protection de ces droits et pour s’assurer de sa mise en œuvre. Il facilite la collaboration des États concernant la migration ainsi que la lutte contre le trafic d’êtres humains et émet des recommandations pour améliorer la mise en œuvre dans les États signataires. Il ne dispose toutefois pas de compétences pour assurer une protection effective des droits des travailleur·euse·s migrant·e·s.