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Toujours pas assez d'aires d’accueil pour les Roms

08.11.2017

L’organisation «Société pour les peuples menacés» (SPM) a publié le 31 octobre 2017 un rapport indiquant que policiers considèrent eux aussi la création d’aires d’accueil supplémentaires pour les Roms nomades étrangers comme priorité.

Le rapport repose sur plusieurs entretiens menés avec des Roms nomads et des membres de la police de différents cantons. Voici le communiqué de presse de «Société pour les peuples menacés». Il s'inscrit dans le cadre du projet «Roms nomades en Suisse», la SPM, avec le soutien de l’association Verband Sinti und Roma Schweiz (VSRS)

Ce que dit la SPM

Depuis des décennies, les groupes de Roms nomades parcourent la Suisse entre le printemps et l’automne. La VSRS estime entre 500 et 800 le nombre de caravanes étrangères présentes sur notre territoire entre mars et septembre. Ce nombre passe de 1200 à 1500 entre juillet et août, les mois les plus fréquentés. En vertu des textes de loi sur l’interdiction de discrimination en Suisse, de l’Accord sur la libre circulation des personnes signé avec l’Union européenne ainsi que d’autres accords multilatéraux, les minorités nomades étrangères ont le droit de séjourner sur les aires d’accueil en Suisse, au même titre que les minorités nomades suisses. Et pourtant, la situation des Roms nomades étrangers s’est nettement dégradée ces dernières années. En raison du manque cruel d’aires d’accueil, ces derniers se voient contraints toujours plus souvent de se limiter à des «haltes spontanées», c’est-à-dire à des séjours de courte durée hors des aires d’accueil officielles, par exemple chez des agriculteurs, ou sur des aires communales publiques qui autorisent le stationnement de caravanes contre paiement. La plupart du temps, ces séjours se déroulent sans heurts. Mais dans certains cas, il arrive que des conflits éclatent, lesquels, faute d’événements pendant la période creuse des vacances, sont repris par les responsables politiques et les médias qui les mettent sur le compte d’«occupations illégales».

Les Roms nomades travaillent en Suisse depuis des décennies et répondent à une certaine demande

Afin de saisir le point de vue des Roms nomades, la SPM et la VSRS ont réalisé 29 interviews avec des représentant-e-s de groupes de Roms nomades en Suisse, pendant l’été 2017. Les résultats montrent que la majorité d’entre eux sont originaires d’Europe occidentale et d’Europe du Nord et qu’ils viennent en Suisse principalement pour exercer une activité lucrative. Beaucoup ont une clientèle fixe. Ils se constituent des niches dans leurs domaines d’activité et répondent à une certaine demande de la population. L’idée que les Roms nomades ne s’arrêtent en Suisse que pour une courte durée et qu’ils ne sont que «de passage» ne tient compte que de manière très limitée de la réalité car ils y restent souvent entre deux et trois mois. Il faudrait par conséquent adapter et améliorer d’urgence les infrastructures sur les aires d’accueil.

Créer des aires d’accueil supplémentaires : une priorité aussi selon la police

Afin de saisir le point de vue de la police, des postes de police situés dans des cantons particulièrement fréquentés par les groupes nomades ont été contactés. Cinq fonctionnaires de police des cantons de Thurgovie, de Zurich, d’Argovie et de Berne ont accepté de partager leurs expériences. Il en est ressorti que les agents de police accomplissent souvent des tâches à l’égard des Roms qui, à l’origine, ne font pas partie de leur champ d’activité. Ainsi, la plupart des aires de transit sont-elles directement administrées par la police. Lors de «haltes spontanées», il n’est pas rare que ce soit la police qui mette en place et contrôle les infrastructures nécessaires. Selon les policiers, la création d’aires d’accueil officielles est une priorité. Leur marge de négociation avec les groupes de Roms nomades est limitée en raison du manque d’aires d’accueil. Celui-ci constitue également l’une des causes principales de conflit entre les Roms nomades et la police. Contrairement à ce que suggèrent des personnalités politiques, la présence de Roms nomades n’engendre, selon les policiers interrogés, aucune augmentation de la criminalité.

Afin d’améliorer la situation des Roms nomades en Suisse et de désamorcer les conflits actuels de façon durable, la SPM et la VSRS demandent aux responsables politiques, aux autorités et à la police d’adopter les mesures suivantes:

Aires d’accueil

  • Il faut créer davantage d’aires d’accueil pour les groupes nomades, en y aménageant les infrastructures nécessaires adaptées à des séjours de plusieurs mois.

Participation

  • Les Roms nomades doivent être intégrés dans les processus d’aménagement des aires d’accueil.
  • La médiation interculturelle entre nomades et sédentaires doit être soutenue, élargie et institutionnalisée.
  • A l’avenir, la gestion des aires d’accueil en Suisse ne devra plus être confiée à la police mais à des personnes privées.

Police, responsables politiques, autorités et propriétaires fonciers

  • Il faut améliorer la coordination entre les services spécialisés dans l’aménagement du territoire, la police cantonale et les propriétaires fonciers.
  • Les centres de formation de police doivent proposer des ateliers et des stages de formation continue sur l’histoire, la culture et les besoins des Roms nomades.

Sources