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Un index sur l’apatridie pour documenter la situation en Europe

01.04.2019

L’index sur l’apatridie du Réseau Européen sur l’Apatridie fait le point sur la situation en Europe depuis 2018.  Il permet de comparer la façon dont 18 différents Etats, parmi lesquels la Suisse, protègent les personnes apatrides. Il compare également les pratiques mises en place pour réduire leur nombre et prévenir l’apparition de nouveaux cas. En 2019, l’index s’est élargi en documentant plusieurs autres pays et en formulant de nouvelles questions, notamment celle de la déchéance de nationalité dans les accords de réadmission.
L’index a été créé par le Réseau européen sur l’apatridie, en collaboration avec plusieurs partenaires nationaux apportant des précisions sur la juridiction et les pratiques administratives locales. L’association humanrights.ch a contribué à l’élaboration du site pour la Suisse, avec la participation du Bureau du HCR pour la Suisse et le Liechtenstein.

Quelles infos?

L’index sur l’apatridie permet aux utilisatrices/utilisateurs de connaître les pratiques juridiques qui règnent dans les pays membres et d’identifier celles qui fonctionnent le mieux. Les informations présentées pour chaque pays couvrent les cinq domaines suivants: les directives dictées par le droit international, les statistiques concernant les populations apatrides, les procédures d’attribution et de détection du statut d’apatride, la détention des personnes apatrides et enfin la prévention et la réduction du phénomène. L’on peut soit faire une recherche sur un pays en particulier, soit comparer les différents pays sur l’un ou l’autre des domaines traités. Cela permet de constater rapidement où se trouvent les bonnes pratiques et quels sont les points problématiques qui nécessitent des améliorations.  

Accès gratuit

Cet index gratuit a été mis sur pied dans l’idée de servir aux ONG, aux fonctionnaires de l’administration et des différentes autorités, aux avocat-e-s ainsi qu’aux chercheuses/chercheurs et aux personnes apatrides elles-mêmes.
En plus de la Suisse, l’index contient des informations sur 17 autres Etats: la Bulgarie, l’Italie, la Lettonie, la Norvège, la Hongrie, la France, l’Allemagne, la Macédoine, la Moldavie, les Pays Bas, la Pologne, la Serbie, la Slovénie, le Royaume Uni et l’Ukraine et Chypre.

Situation suisse en comparaison

L'index permet de constater que la Suisse présente une faible protection des personnes apatrides en comparaison des autres États européens, même s’il existe certaines mesures spécifiques positives (voir notre article sur l’apatridie en Suisse). Elle gère plutôt bien l’enregistrement d’enfants nouveaux nés apatrides. Elle fait également en sorte que les pratiques liées à l’adoption ne conduisent pas à créer de nouveaux cas d’apatridie. Idem pour les enfants trouvés. La Suisse ne dispose cependant d’aucune mesure de protection pour les enfants qui naissent apatrides sur son sol, ce qui viole le droit de l’enfant à acquérir une nationalité, comme le spécifient pourtant l’art. 24 du Pacte ONU II et l’art. 7 de la Convention des droits de l’enfant (voir notre article sur les enfants apatrides).

Lorsque l’on compare la situation suisse avec ce qui se passe dans d’autres pays voisins, l’on constate également que d’autres changements sont nécessaires. Ainsi, la Suisse a ratifié la Convention de 1954 relative au statut des apatrides, mais c’est le seul traité international sur cette thématique pour lequel elle a fait le pas. La Suisse présente également des lacunes en matière de recensement du phénomène et de statistiques. L’on ne sait toujours pas combien de personnes apatrides vivent réellement en Suisse et quelles sont leurs conditions d’existence.

Il faut une procédure spécifique

La procédure de reconnaissance du statut d’apatride en Suisse se base principalement sur le droit général de procédure administrative. A l’inverse d’autres Etats européens, le pays dispose donc d’une procédure de reconnaissance et accorde un permis de séjour à celles et ceux à qui elle reconnaît ce statut. C’est un point positif. Il serait néanmoins important que la Suisse dispose d’une loi spécifique pour règlementer la procédure de reconnaissance, comme c’est le cas dans neuf pays européens, parmi lesquels la France et la Moldavie. Une telle loi devrait notamment règlementer le statut juridique des personnes concernées en cours de procédure, ainsi que la question des preuves à apporter et de la protection juridique. En outre, la définition même de l’apatridie adoptée par nos autorités est problématique. Elle diffère de celle exposée dans la Convention relative au statut des apatrides, excluant de ce fait plusieurs personnes vulnérables.

Enfin, la situation concernant la détention arbitraire des personnes apatride n’est pas claire. L’on ne sait pas combien de personnes apatrides se trouvent en détention administrative en Suisse en vertu du droit des étrangers. Le critère de l’apatridie n’est en effet pas systématiquement examiné lors de la vérification de la légalité de ce type de détention. Ceci doit également être amélioré.

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