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La Suisse siègera au Conseil des droits de l’homme entre 2016-2018

11.11.2015

Le 28 octobre 2015, l'Assemblée générale de l'ONU à New York a élu la Suisse pour trois ans, par 176 voix sur 193. Une élection sans surprise, puisque la Suisse était l’une des trois candidat-e-s à se présenter pour l’un des 3 sièges vacants au sein du bloc de l’Europe de l’Ouest au Conseil des droits de l’homme (CDH).

La règle voudrait pourtant que plusieurs candidats soient mis en concurrence pour l’obtention des sièges au CDH. Cette «mise au concours» a bien des avantages en termes de promotion des droits humains et constitue un élément fondamental pour la crédibilité du CDH. L’on ne peut donc que regretter qu’elle ait manqué en cette occasion.

La Suisse a déjà siégé deux fois au Conseil des droits de l’homme, entre 2006 et 2009 et entre 2010 et 2013. En dehors de ces périodes, elle est restée active au sein du CDH, mais ne disposait pas du droit de vote. Son  troisième mandat débutera le 1er janvier 2016. 

La Confédération se met en scène

L’absence de concurrence n’a cependant pas empêché la Suisse de faire sa «publicité» en amont des élections, comme le prévoit la procédure. Le Département fédéral des affaires étrangères (DFAE) a soutenu la candidature suisse avec une brochure mettant largement en scène les grandes qualités helvétiques et chantant haut et fort sa légitimité à occuper un siège auprès du CDH: «La Suisse candidate au Conseil des droits de l’homme 2016–2018». La brochure évoque également les «contributions volontaires et engagements de la Suisse», énumérés dans un document à part.

Là où le bât blesse

Les engagements de la Suisse en matière de politique extérieure des droits humains sont dans l’ensemble crédibles et cohérents.  Certaines promesses touchant à la politique intérieure, listées ci-dessous, sont pour leur part plus problématiques. Alors que certaines semblent difficiles à tenir, d’autres sont formulées de façon telle que l’on peut y voir un marché de dupes:

  • Créer un mécanisme national ad hoc chargé de faciliter le développement de procédures standards en vue de la préparation des rapports périodiques et d’assurer le suivi de la mise en œuvre des recommandations acceptées par la Suisse: la mise en place d’un service de coordination était déjà à l’ordre du jour en 2014. Le processus a cependant été stoppé, il semblerait pour des raisons budgétaires.  
  • Mettre en œuvre de bonne foi les recommandations de l’EPU acceptées par le gouvernement en 2012: les ONG ignorent encore à ce jour quelles mesures concrètes ont été adoptées pour quelles recommandations.  
  • Envisager la création d’une institution nationale de droits humains, conformément aux principes de Paris: le conseil fédéral utilise cette formulation pour le moins vague depuis le cycle 2008 de l’EPU suisse et elle semble à chaque fois un peu moins crédible qu’avant.
  • Multiplier les efforts consentis pour signer et ratifier des instruments internationaux portant sur les droits de l’homme dont la Suisse n’est pas encore partie: c’est un objectif louable, malheureusement amoindri par le fait que seuls sont cités à titre d’exemple la Convention sur les personnes disparues et le troisième protocole à la Convention des droits de l’enfant, pour lesquels le processus politique est déjà bien avancé. Pas un mot par contre sur les vrais enjeux, à savoir le Premier Protocole facultatif au Pacte II, la Charte sociale européenne révisée et le Protocole facultatif n°12 à la Convention européenne des droits de l’homme pour l’interdiction de la discrimination. 

Contraste entre politique intérieure et extérieure

L’on se réjouit bien sûr que la Suisse puisse à nouveau amener au sein du Conseil des droits de l’homme les compétences de ses diplomates et ses objectifs en matière de droits humains. Le revers de la médaille reste une fois de plus les points faibles de sa politique intérieure des droits humains. Il serait dommage que l’important contraste qui subsiste entre des positions progressistes en matière de politique extérieure et le blocage, pour ne pas dire la paralysie, qui caractérise la politique intérieure soit perçu comme une forme d’hypocrisie de notre gouvernement.

Sources