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Institution nationale des droits humains

Institution nationale des droits humains: humanrights.ch prend position sur l’avant-projet de loi

30.08.2017

 

Le 28 juin 2017, le Conseil fédéral a envoyé en consultation un avant-projet de loi qui servira de base à la création d’une Institution nationale indépendante des droits humains en Suisse (INDH). La loi elle-même règlera la question du financement de l’institution par le biais d’une subvention. Elle définit également la forme que devrait prendre l’INDH et les tâches qui seront siennes.

Le 22 août 2017, l’association humanrights.ch a envoyé sa prise de position à l’Office fédérale de la justice. Tout en saluant la décision du Conseil fédéral de créer une Institution nationale des droits humains, l’association voit plusieurs points sur lesquels le projet doit être amélioré. Un combat qui s’annonce ardu pour la société civile dans le climat politique actuel, où les droits humains sont toujours plus ouvertement remis en question.

Une Institution nationale au statut A

L’association humanrights.ch, qui s’engage depuis 2001 pour la création d’une Institution nationale des droits humains en Suisse, juge positif que l’avant-projet de loi se réfère explicitement aux Principes de Paris. Pour l’association, seule une institution largement conforme aux principes de Paris, et donc de statut A comme c’est le cas en France et en Allemagne, est acceptable en Suisse. «C’est la seule option satisfaisante à nos yeux et en accord avec l’image de la Suisse en matière de droits humains», souligne humanrights.ch dans sa prise de position. «Une Institution nationale des droits humains de statut B ne serait pas prise au sérieux à l’international et serait préjudiciable pour l’image de la Suisse. »

Quelle indépendance?

Pour que l’Institution nationale des droits de l’homme suisse accède à un tel statut, il est certains points de la loi qui doivent impérativement être modifiés. Le premier problème concerne le rattachement prévu de cette INDH aux «Hautes écoles ou autres institutions du domaine des Hautes écoles». En plus des difficultés liées à une organisation sur cinq sites différents, il existe une réelle opposition entre un mandat pour les droits humains et le principe de liberté académique qui caractérise les universités et hautes écoles. Une opposition qui rend ce type d’institution difficilement capable d’abriter une INDH qui remplirait réellement les mandats qui sont les siens si elle respecte les principes de Paris (voir l’exemple de la Norvège, dont l’institution nationale a rencontré ce type de difficulté).

Par ailleurs, un des arguments en faveur d’une telle organisation est le fait que, ainsi, Universités et Hautes écoles participent de façon indirecte aux coûts d’infrastructure de l’INDH, et à travers eux les cantons. Un subventionnement indirect qui ne rend toujours le million annuel de budget prévu pour l’INDH suffisant et pose en plus un problème de poids pour l’indépendance de l’Institution, pourtant garantie à l’article 8 de l’avant-projet de loi.

Si la solution finalement adoptée ne peut être autre que l’ancrage universitaire, il est alors du point de vue de humanrights.ch impératif que l’Institution dispose d’une identité juridique propre. «C’est la solution sine qua non pour garantir que l’indépendance de l’INDH soit une réalité et pas seulement un tigre de papier», soulignent les responsables Christina Hausammann et Alex Sutter.

Aussi la politique extérieure

Pour les co-responsables de humanrights.ch, il faut également revoir le mandat de la future Institution nationale indépendante des droits humains. Il n’y a d’après l’organisation aucune raison de limiter la tâche de l’INDH à la seule «promotion» des droits humains, comme cela est prévu à l’article 3 de l’avant-projet de loi. Les Principes de Paris spécifient sans ambiguïté que le mandat d’une INDH comprend également la protection des droits de l’homme et c’est ainsi qu’il doit en être en Suisse également.

L’INDH suisse devrait par ailleurs aussi s’occuper d’assurer un accès indiscriminé à la justice pour tout à chacun. En outre, la possibilité pour l’INDH d’«agir de sa propre initiative et définir elle-même ses activités et ses priorités en tenant compte de l’actualité et des besoins», mentionnée dans le rapport explicatif, doit apparaître en toute lettres dans le projet de loi (à l’article 3). Ceci afin d’assurer la réalisation de cette différence majeure entre l’actuel Centre de compétence suisse et la future Institution nationale des droits humains.

Enfin, l’organisation s’oppose au projet, également mentionné dans le rapport explicatif, d’exclure la politique extérieure des mandats de l’Institution. «On ne peut concevoir de politique cohérente en matière de droits humains sans considérer également la politique extérieure de la Suisse, martèle dans sa prise de position humanrights.ch. Il n’y a qu’à voir l’exemple de l’exportation de matériel de guerre».  

L’INDH la plus pauvre d’Europe?

Mais même en l’état actuel de l’avant-projet de loi, le budget d’un million par an reste insuffisant pour permettre à l’Institution nationale suisse de faire son travail. Cela même si l’on y ajoute la participation indirecte problématique des Universités déjà évoquée. Alors que 22 des Etats membres de l’Union européenne disposent d’une telle institution, de même que le Liechtenstein, la Norvège et plusieurs Etats d'Europe de l'Est, aucun de nos voisins ne prévoit un budget aussi bas. L’Autriche, notre voisine à taille comparable, prévoit à titre d’exemple quelque 6.5 millions d’euros par année pour son Institution en charge des droits humain. Sans aller jusque-là, la Suisse se doit au moins d’attribuer à sa propre institution les moyens de l’efficacité et de l’indépendance.

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