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L’initiative interdisant les minarets est contraire aux droits humains

01.12.2009

La population suisse a accepté l’initiative populaire interdisant la construction de minarets avec 57.5% des voix, le 29 novembre 2009. Cette interdiction sera donc inscrite dans la Constitution suisse, contrevenant ainsi les droits fondamentaux de la communauté musulmane vivant en Suisse de façon inacceptable du point de vue du respect des droits humains. Le gouvernement a pris acte de la volonté populaire. Les organisations des droits humains se sont dites consternées. Les réactions internationales ne se sont pas fait attendre.

Liberté de religion et interdiction de la discrimination

La liberté de religion est ancrée dans la Convention européenne des droits de l’homme (CEDH art.9) tout comme dans la Constitution fédérale (CF art.15). Dans le texte de l'initiative, elle est restreinte de façon injustifiable. Selon la CEDH, de telles restrictions à la liberté de manifester sa religion ou ses convictions ne sont possibles que lorsqu’elles «constituent des mesures nécessaires, dans une société démocratique, à la sécurité publique, à la protection de l’ordre, de la santé ou de la morale publiques, ou à la protection des droits et libertés d’autrui» (CF art.9 §2).

La discrimination est interdite par la Constitution fédérale, qui stipule que «nul ne doit subir de discrimination du fait notamment de (...) ses convictions religieuses» (CF art.8 §2). L'interdiction des minarets est dès lors problématique car elle stigmatise exclusivement les musulmanes et les musulmans de Suisse. En effet, si seule la construction de tours musulmanes est interdite, elle est injustifiable, car elle ne diffère en rien, du point de vue esthétique ou du droit de la construction, de temples bouddhistes ou hindouistes, ou encore d'églises chrétiennes. Selon la jurisprudence du Tribunal fédéral, une discrimination a lieu dès lors que le droit d'un groupe de personnes est restreint sans que cette restriction n'ait pas d'explications raisonnables.

De plus, une interdiction de construire des minarets est en contradiction avec le principe de proportionnalité (CF art.5 §2) et avec le respect du droit international (CF art.5 §4) que garantit la Constitution. Il est admis qu'en cas de victoire de l'initiative, des plaintes seront déposées devant la Cour européenne des droits de l'homme pour violation à la CEDH.

Avertissement du Comité des droits de l'homme

Lors du récent examen du rapport de la Suisse sur sa mise en oeuvre des droits civils et politiques, conformément à ses obligations d'Etat ayant ratifié le Pacte international relatif à ces droits, le Comité des droits de l'homme s'était déclaré préoccupé par les conséquences de l'initiative. Il avait ainsi abordé le sujet dans ses observations finales à l'égard de la Suisse, publiées le 3 novembre 2009: «Le Comité est préoccupé par l’initiative tendant à interdire l’édification de minarets dans le pays et par la campagne d’affichage discriminatoire qui l’accompagne. Il note que l’État partie n’appuie pas cette initiative qui, si elle était votée, mettrait l’État partie dans une situation de non-respect de ses obligations en vertu du Pacte (art.2, art.18 et art.20).»Le Comité recommandait à la Suisse de «veiller sans relâche à assurer le respect de la liberté de religion et lutter fermement contre l’incitation à la discrimination, à l’hostilité et à l’intolérance». (Source: article 8 du docment CCPR/C/CHE/CO/3)

Documentation après la votation

Documents de l'administration

Réactions en Suisse

Réactions internationales

Documentation avant la votation

Documents de l'administration

Prises de position et communiqués

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