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Libre-échange Suisse-Chine: mettre les droits humains au centre

09.02.2011

Depuis le 28 janvier 2011, la Suisse négocie officiellement avec la Chine en vue de conclure un accord bilatéral de libre-échange. Alliance Sud, la Déclaration de Berne, Société pour les peuples menacés et Société pour l’amitié helvético-tibétaine se sont réunies afin d’accompagner de manière critique la préparation et les négociations du futur accord.

Les quatre organisations pour le développement et les droits humains sont liées par un même souci: la situation insatisfaisante des droits humains en Chine et les risques de conflits apparaissant entre les obligations commerciales et le respect des obligations en matière des droits humains.

Position

Dans leur document de synthèse, les organisations concernées ont exprimé leurs revendications, mais également leur crainte: le libre-échange n’est pas une fin en soit et ne doit pas le devenir. L’objectif supérieur de l’accord suisse doit être d’améliorer la situation des droits humains. Pour ce faire, les droits humains doivent revenir au centre des négociations.

Les quatre organisations ont ainsi demandé à ce que la Suisse effectue une évaluation de l’impact de l’accord sur les droits humains en Chine avant que celui-ci ne soit conclu. Elles ont également demandé que des clauses contraignantes sur les droits humains soient intégrées dans l’accord, ce que l’administration fédérale a, jusqu’à ce jour, refusé. Enfin, Alliance Sud, la Déclaration de Berne, la Société pour les peuples menacés et la Société pour l’amitié helvético-tibétaine ont appelé a plus de transparence. La Suisse doit fournir une information publique sur ses positions et revendications ; sans quoi il est impossible pour la société civile, le Parlement et le grand public de vérifier l’engagement de la Confédération en matière de droits de l’homme.

Evaluation d’impact des droits humains

Il n’est plus aujourd’hui à démontrer que les accords commerciaux peuvent avoir des effets négatifs sur les droits humains. Les droits économiques, sociaux et culturels sont les plus menacés.

Bien sûr, il revient tout d’abord au gouvernement chinois de défendre les droits de sa population. Cela n’empêche cependant pas que, si la Suisse signe un accord de libre-échange avec la Chine, il lui revient, du fait du droit international, de s’assurer que cet accord ne favorise pas des violations des droits humains. La raison en matière de politique de développement, tout comme l’impératif moral d’avoir un accord commercial conforme aux droits humains, parlent également en faveur d’une telle responsabilité. Une évaluation d’impact des droits humains peut en ceci jouer un rôle essentiel, dans la mesure où elle oriente les négociations et leurs résultats.

Clauses contraignantes sur les droits humains

Le fait d’insérer des clauses contraignantes sur les droits humains dans les accords de libre échange est depuis longtemps la règle pour l’Union européenne et d’autres pays. Les conventions fondamentales de l’Organisation internationale du travail (OIT) sont insérées dans les accords en tant que modèle normatif pour le règlement des droits humain dans le travail. Cela implique que les conditions de production soient pertinentes et conformes au droit commercial.

Il est également crucial que des groupes d’experts indépendants et des organisations professionnelles représentant la société civile se saisissent des mécanismes de contrôle obligatoires. Pour permettre aux parties de mettre en œuvre les obligations pour lesquelles elles se sont engagées, il faudrait par ailleurs invoquer les procédures générales de conciliation de l’ALE.

D’autres clauses sur les droits humains peuvent ultérieurement servir à prendre des mesures en cas de violation grave des droits fondamentaux et influencer positivement la situation des droits humains en Chine. Les systèmes d’incitations en sont un exemple.

La CPE veut inscrire le développement durable dans l’accord

Peu avant la publication de la position des quatre ONG, la Commission de politique extérieure du Conseil national (CPE-N) a justement traité la question de l’accord de libre-échange avec la Chine. Elle s’est prononcée en faveur d’un renforcement de la composante sociale et écologique dans le mandat de négociation de la Confédération. «Ainsi, indique la commission dans son communiqué de presse du 16 novembre 2010, [la CPE-N] a tout d’abord adopté, par 13 voix contre 11, une proposition demandant d’intégrer dans l’accord un chapitre portant sur le développement durable, de sorte à garantir, d’une part, que le Conseil fédéral se base sur les bonnes pratiques prévues par les accords de libre-échange conclus par d’autres Etats et, d’autre part, que l’accord tienne également compte de facteurs écologiques et sociaux. La reprise, par les deux parties, des principes défendus par les conventions fondamentales de l’Organisation internationale du travail (OIT) est au centre des préoccupations de la majorité de la commission.»


Sources