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Les Principes directeurs de l'OCDE pour les sociétés transnationales

21.03.2017

Les Principes directeurs de l'OCDE à l'intention des entreprises multinationales présentent une série de recommandations des gouvernements États parties de l'OCDE aux société transnationales (STN) qui exercent des activités depuis leur territoire national.

Révisés pour la quatrième fois en mai 2011, onze ans après la 3e révision, les principes directeurs concernent désormais 47 Etats (dont la Suisse). A côté des 35 Etats de l'OCDE se sont en effet ajoutés l'Argentine, le Brésil, la Colombie, le Costa Rica, l'Egypte, la Jordanie, la Lettonie, la Lituanie, le Maroc, le Pérou, la Roumanie et la Tunisie (état au 18.07.2016).

Les principes directeurs exposent des standards et des critères de référence pour un comportement entrepreneurial conscient de ses responsabilités et soucieux de respecter le droit en vigueur. Les droits humains, les fondements du droit du travail, la protection des consommateurs et de l'environnement, la lutte contre la corruption figurent en première place dans les principes directeurs. Ces principes ne sont pas contraignants et les entreprises les respectent sur une base volontaire. Les États parties s'engagent toutefois à encourager leur respect sur le territoire national.     

Lors de la révision de 2011, les principes directeurs se sont élargis avec un chapitre expressément dédié aux droits humains, aligné sur les travaux de John Ruggie, représentant spécial des Nations Unies pour les entreprises et les droits humains. Quel que soit le pays où elles agissent, les multinationales et leurs filiales sont dorénavant tenues de respecter les droits humains internationalement reconnus dans toutes leurs opérations et relations d’affaires, y compris avec leurs fournisseurs et sous-traitants. Les entreprises signataires sont désormais explicitement tenues à mettre en place des processus de diligence raisonnable (due diligence) visant à prévenir et réduire les impacts négatifs de leurs activités ainsi qu’à éviter toute complicité dans des violations des droits humains. Enfin, le réseau international d’ONG OECD Watch a à présent la possibilité de saisir le Comité d’Investissement de l’OCDE pour juger des performances d’un point de contact national.

Les points de contacts nationaux

Tous les États adhérant aux principes directeurs doivent mettre en place un point de contact national (PCN). Il sera responsable de faire connaître et d'encourager au respect des principes directeurs, de recueillir et de donner des informations aux différents acteurs engagés dans le processus, de collaborer avec d'autres PCN ou encore de préparer un rapport annuel sur la situation nationale. Le point de contact suisse est rattaché au Secrétariat à l'économie (SECO). Celui-ci précise que «toute personne et toute organisation peut informer le PCN du non-respect des Principes directeurs par une entreprise. La notification doit avoir lieu dans le pays où l'infraction a été commise. Si le pays en question n'a pas souscrit aux Principes directeurs de l'OCDE et n'a, de ce fait, pas de PCN, la notification doit être faite dans le pays où l'entreprise multinationale a son siège». 

Talons d'Achille

Vu que les principes directeurs de l'OCDE ne sont pas contraignants, leur mise en œuvre souffre de plusieurs points faibles. Le cas de l’activité du groupe Michelin en Inde en est un exemple. En 2012, plusieurs ONG françaises avaient saisi le PCN de l’OCDE pour protester contre les manquements – défaut de consultations des populations, absence d’étude d’impact social et environnemental – dans le cadre de l’implantation du fabricant de pneumatiques sur les terres de communautés rurales dans l’État du Tamil Nadu. Or, après que les conclusions du PCN aient dédouané l’entreprise de sa responsabilité et loué sa politique de RSE, les plaignant·e·s ont dénoncé la partialité et de nombreuses défaillances du mécanisme dans le traitement du dossier, et s’en sont dessaisies l’année suivante. 

S'il est vrai qu'une STN au comportement douteux risque sa réputation si le point de contact national vient à mettre le doigt sur des pratiques non respectueuses (procédé de naming and shaming), il n'en reste pas moins que certaines sociétés ne sont pas spécialement sensibles à l'opinion du public (notamment tous les intermédiaires peu connus du grand public). Ces sociétés qui se passent d'une belle carte de visite sont alors difficiles à toucher. De plus, les principes directeurs ne s'appliquent qu'aux sociétés qui commettent une infraction ou ont leur siège dans l'un des États parties. À titre d'exemples, beaucoup de pays asiatiques sont ainsi exclus des principes directeurs.

Il faut néanmoins souligner que les principes directeurs englobent quantités d'acteurs différents. Il est par exemple très positif que des associations patronales, des syndicats mais également des ONG puissent participer aux mécanismes de plainte. Afin de participer pleinement au travail de contrôle et de peser dans les négociations avec l'OCDE, différentes ONG se sont regroupées dans le réseau international OECD-Watch en 2003.

Code de bonnes pratiques

En janvier 2017, le Secrétariat d’Etat à l’économie (SECO) a fait paraître un guide de bonnes pratiques concernant une application effective des principes directeurs de l’OCDE à l’intention des entreprises multinationales. Le SECO souligne qu’il est important d’encourager les entreprises dans la mise en œuvre de ces principes ainsi que de ceux du Pacte Mondial des Nations Unies (UN Global Compact). Dans cette optique, le SECO a constitué une liste de conseils et d’exemples pratiques ainsi qu’une feuille de route pour un contrôle interne au sein des entreprises.

Dans cette publication, le SECO affirme qu’il est dans l’intérêt des entreprises de prendre leurs responsabilités sociales au sérieux. En effet, en respectant leurs engagements sociaux, ces multinationales profiteraient d’une crédibilité plus élevée dans le domaine de la RSE (Responsabilité sociétale des entreprises), elles éviteraient des rapports de presse négatifs et allégeraient leurs coûts d’exploitation et leurs dépenses énergétiques.

Le SECO demande aux entreprises de poursuivre une politique d’information transparente exemplaire, en informant régulièrement sur leurs pratiques commerciales ainsi que sur leurs répercussions sur la société et l’environnement. Dans le guide, l’exemple du rapport annuel «Nestlé en société» est présenté. En effet, le géant de l’agroalimentaire publie chaque année un rapport sur ses efforts dans les domaines sociétaux et écologiques.

Le guide de bonnes pratiques contient également un test permettant un contrôle interne rudimentaire afin d’évaluer la politique des multinationales dans le domaine de la responsabilité sociale. Cependant, ceci ne représente qu’une porte d’entrée dans la thématique et ne remplace pas une évaluation réelle. La valeur du guide repose donc principalement sur son aptitude à expliquer d’une manière compréhensible les principes directeurs de l’OCDE et de les étayer avec des exemples.

Analyse critique des principes directeurs