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L'aide d'urgence: une stratégie en échec

01.06.2010

15% des personnes touchant l’aide d’urgence demeurent de façon durable en Suisse. Alors que la Confédération crie victoire, les ONG ne voit pas là de quoi se réjouir. Echec plutôt que réussite, c’est ce à quoi font penser ces centaines de personnes vivant durablement en Suisse dans la précarité la plus absolue, au nom d’une mesure peu efficace en considération de son coût humain.  A l’heure où la nouvelle révision de la loi sur l’asile devrait encore augmenter le nombre de ceux réduits à l’aide d’urgence, la perspective est loin d’être rassurante.

Depuis deux ans, les demandeurs d'asile déboutés ne reçoivent plus d'aide sociale. Comme les demandeurs frappés d'une non-entrée en matière (NEM), les demandeurs déboutés sont placés à l'aide d'urgence. Cette aide minimale leur est donnée sous différentes formes selon les cantons, mais impliquent généralement de vivre dans des logements provisoires, sans revenu ni possibilité de travailler, sans formation ni suivi médical en dehors des cas d’urgence.  Alors que Christophe Blocher était en charge du Département de justice et police, la Confédération et les cantons avaient soutenu ce projet en estimant qu'il encouragerait les demandeurs déboutés à ne pas rester en Suisse. Une étude commandée par l’ODM sur demande de la Confédération et des cantons montre que cette stratégie doit être revue.

Echec d’une mesure inhumaine

Pour certaines personnes, l’aide d’urgence représente un scénario moins catastrophique que le retour dans leur pays d’origine. « Aussi, indique l’étude commandée par l’ODM, les autorités doivent elles aujourd’hui s’attendre à ce qu’un nombre non négligeable de requérants déboutés perçoivent l’aide d’urgence pendant plusieurs années.» Difficile de trouver dans cette conclusion la grande réussite de la suppression de l’aide sociale aux requérants déboutés rapportée par l’ODM dans son communiqué du 27 mai 2010. 

La précarisation ne conduit pas certaines personnes concernées à quitter volontairement la Suisse, d’autant plus qu’elles craignent d’être persécutées en cas de retour dans leur pays. Le rapport indique que les femmes et les personnes âgées sont particulièrement concernées. C’est ce que dénoncent également une coalition d’ONG regroupant l’Observatoire suisse du droit d’asile et des étrangers (ODAE), l’Organisation suisse d’aide aux réfugiés (OSAR), Amnesty international et Solidarité sans frontières. La coalition d’ONG note par ailleurs avec pertinence que « le rapport suggère que toutes les autres personnes déboutées ont quitté la Suisse pour rentrer dans leur pays, parce qu’elles n’apparaissent pas dans les structures d’aide d’urgence. Cette affirmation doit être sérieusement mise en doute. Il est bien plus probable que les personnes qui arrivent à se débrouiller en Suisse ne sont pas assignées à l’aide d’urgence [qui s’obtient sur demande] tandis que les plus faibles – femmes, enfants, familles et personnes âgées – recourent au contraire davantage à cette aide. »

Toujours plus de requérants à l’aide d’urgence

C’est pourquoi il est urgent de mettre sur pied une solution qui respecte la dignité humaine. De plus, les droits des enfants, comme le droit à aller à l’école et le droit à des soins médicaux adaptés, doivent être garantis.
Ceci est d’autant plus impératif que la nouvelle révision de la loi sur l’asile proposée par Madame Widmer Schlumpf prévoit que les personnes qui déposent une demande multiple soient à terme également exclues de l’aide sociale. De plus en plus de requérants devraient donc à l’avenir être soumis au régime de l’aide d’urgence qui durent pour certains sur une très longue durée.

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