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Requérants sans papiers : le TAF rend deux décisions de principe

24.08.2007

Le Tribunal administratif fédéral (TAF), qui a remplacé la Commission de recours en matière d’asile et dont les décisions sont définitives, a rendu public début août 2007 deux décisions de principes concernant l’implémentation de la nouvelle loi à l’asile. En effet, selon un arrêté rendu le 11 juillet, il peut y avoir entrée en matière d’une demande d’asile lorsque leur auteur est dépourvu de papiers même en cas de doute,  – et non seulement, comme le pratiquait l’Office fédéral des migrations (ODM) depuis l’entrée en vigueur de la nouvelle loi su l’asile, pour les seules demandes d’asile fondées. C’est ainsi que l’a interprété l’Organisation suisse d’aide aux réfugiés (OSAR).

Réactions contradictoires de l’OSAR et l’ODM

Avec cette décision, l’OSAR voit ses critiques du 19 juillet 2007 à l’encontre de la pratique de l’ODM confirmées. De son côté, l’ODM interprète différemment l’arrêt puis qu’il sous-titre son communiqué par « le TAF confirme des décisions de non-entrée en matière prononcées par l'ODM, allant ainsi à l'encontre des déclarations de l'OSAR ».

Explications du TAF

L’arrêt du TAF précise que seuls les cas dans lesquels l’absence de mise en danger est manifeste peuvent faire l’objet d’une procédure de non-entrée en matière pour non-remise de papiers. « Aussitôt que doivent être examinées des questions juridiques ou factuelles, il faut entrer en matière sur la demande, explique l’OSAR dans son communiqué. La procédure expéditive de non-entrée en matière n’est pas adaptée à des cas appelant des compléments d’enquête. Faute d’un message du Conseil fédéral, le TAF base pour l’essentiel ses considérations sur des assertions sujettes à interprétation faites durant les débats parlementaires par le Conseiller fédéral Blocher ainsi que sur les assurances fournies par le Conseil fédéral dans le fascicule de votation ». L’ODM, lui, interprète que « selon le TAF, une non-entrée en matière est exclue dans tous les cas nécessitant un examen approfondi ».

Papiers d’identités : interprétation restrictive

Dans un autre arrêt du TAF également daté du 11 juillet 2007, la pratique de l’ODM qui a été confirmée : seule la remise d’un passeport ou d’une carte d’identité est acceptée pour une procédure d’asile. Les documents établis à d’autres fin que celle de déterminer l’identité, tels que permis de conduire, certificat de naissance ou livret militaire, ne suffisent plus.

Préoccupation de l'OSAR à mi-année

Plus de la moitié des non-entrées en matière (NEM) sont d’ores et déjà motivées par l’absence de papier, alors qu’ils n’étaient qu’un sur dix en 2005. Voila ce qu’a constaté l’Organisation suisse d’aide aux réfugiés (OSAR) suite à l’analyse de plusieurs centaines de dossiers traités par l’Office fédéral des migrations (ODM) pendant les cinq premiers mois de 2007. Et l’organisation de s’inquiéter de la pratique de l’administration fédérale, qu’elle a critiqué le 19 juillet 2007 de ne pas tenir les promesses faites lors de l’acceptation de la révision de la loi sur l’asile, en particulier l’application trop sévère de la nouvelle procédure en cas d’absence des papiers.

Débat autour du risque de décisions erronées

Selon l’OSAR, des non-entrées en matière sont ainsi prononcées même si l'identité est établie ou rendue vraisemblable par des documents tels qu'un permis de conduire ou un certificat de naissance. La possibilité de prolonger le délai de 48 heures pour la remise de papiers n'est en outre pas utilisée. L'organisation indique par ailleurs que l'ODM rejetterait d'office des motifs d'excuses à l'absence de papiers en argumentant qu'ils sont invoqués par beaucoup de requérants. C'est notamment le cas pour la confiscation des documents par les passeurs.
Au final, toujours selon les défenseurs du droit d'asile, «des personnes sont confrontées à une non-entrée en matière quand bien même elles ont été victimes de viol, de mutilation génitale ou ont fui la guerre.» L'ODM, qui tire un bilan plutôt positif des nouvelles dispositions légales, se défend d'avoir outrepassé dans sa pratique la ligne définie par le Parlement et rappelle que chaque requérant est auditionné en présence de représentants d’organisation d’entraide pour voir s’il y a des motifs excusables à l’absence de papiers ou des indices des indices de persécution.

Une application de la loi critiquée : le cas de Soleure

Une enquête du Courrier met en lumière le cas de Soleure, qui met en vigueur avec six mois d’avance une procédure en adressant un courrier menaçant à ses requérants déboutés pour qu’ils quittent leur logement. Conformément à la Constitution, rappelle le porte parole de l’ODM, ils ont alors droit au minimum vital, soit avoir un gîte et un couvert assuré, dont le montant est géré par le canton. Soit un centre isolé dans la campagne soleuroise (compter 11 francs pour aller simple en bus jusqu’au premier centre commercial) et 8 francs par personne et par jour, avec tarif dégressif qui propose 3 francs dès la cinquième personne… explique Françoise Kopf, présidente de l’antenne soleuroise IGA-SOS racisme.