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La Suisse fait objection aux réserves du Pakistan en faveur de la charia

04.08.2011

Au moment de ratifier un traité international des droits humains, chaque Etat peut opposer certaines réserves. Celles-ci indiquent que l’Etat en question accepte certains articles du traité de façon incomplète seulement. Mais ce n’est pas là la seule liberté d’un Etat signataire. Chaque Etat partie à un traité a ainsi la possibilité, dans un délai après ratification fixé, de s’opposer à certaines réserves faites par un autre Etat signataire. Ces «objections» ne rendent pas automatiquement la ratification invalide. Elles ont cependant pour effet d'empêcher l'application des dispositions sur lesquelles porte la réserve entre l'Etat auteur de la réserve et celui qui s'y est opposé.

Première objection depuis longtemps

Voilà de très nombreuses années que la Suisse n’a pas émis d’objections vis-à-vis des réserves d’autres Etats signataires. Ceci alors même que certains Etats ont pour habitude de multiplier ces réserves au moment de la ratification. Pour certains Etats européenns, tels la Finlande, la France ou encore la Norvége, l’objection fait partie intégrante d’une politique de suivi permettant d’assurer un standard minimum en matière de droits humains. 

Le 28 juin 2011, la Suisse a pourtant rompu avec sa tradition du silence. Elle a coup sur coup fait objection contre les réserves émises par le Pakistan dans le cadre de la ratification de deux traités : le Pacte II de l’ONU pour les droits civils et politiques et la Convention contre la torture. Au moment de ratifier ces deux Traités, le Pakistan a entre autres émis une réserve générale concernant le droit matériel central. Les réserves faites par le Pakistan subordonnent le respect des dispositions du Pacte international et de la Convention contre la torture à la conformité au droit interne de la République islamique du Pakistan, y compris la Constitution et les dispositions de la charia. Cette pratique est régulièrement utilisée par d’autres Etats islamiques dans une forme plus nuancée. 

La Suisse a justifié ses deux objections en soulignant qu’une réserve générale comme celle émise à deux reprises par le Pakistan laisse de sérieux doute quant à la capacité du Pakistan de respecter ses obligations en tant qu’Etat partie aux traités. Dans le cadre le Pacte II, les réserves concernent également des normes impératives de droit international (jus cogens). Celles-ci bénéficient d’une protection absolue et aucune réserve les concernant ne peut donc être acceptée.