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Amnestie, renvoi ou longue incertitude pour les requérants déboutés vaudois

24.01.2007

Deux ans et demi de mobilisation pour 523 personnes menacées de renvoi habitant le canton de Vaud. Si plus de 150 personnes ont reçu une autorisation de séjour, des dizaines de personnes et de familles attendent la réponse à un recours. L'incertitude dure depuis l'été 2004, voire des années.

Amnestie pour les requérants déboutés ? (2ème rencontre en juillet)

Suite à une deuxième rencontre le 5 juillet 2006 entre le Conseiller fédéral Christoph Blocher et la délégation du Conseil d'Etat vaudois, Berne avait rendu ses premières décisions dans le dossier dit des "523". Sur les 229 requérants d'asile dont le sort était encore en suspens, 67 ont reçu un permis de séjour (dont 4 sous réserve de vérification de leur identité) tandis que le renvoi de 16 personnes a été maintenu. En outre, 146 personnes se trouvent encore dans une procédure extraordinaire, soit auprès de la Commission suisse de recours en matière d'asile (CRA), soit auprès de l'Office fédéral de la migration (ODM).  

Les députés vaudois adoptent un décret dans ce sens mais Berne tergiverse (1ère rencontre en mars)

Une délégation du Conseil d’Etat vaudois a rencontré mercredi 8 mars à Berne le Conseiller fédéral Christoph Blocher afin de discuter sur la procédure à suivre dans le cas des requérants d’asile déboutés (soit, au regard de la loi, 86 en phase d’exécution du renvoi et 138 engagés dans des voies de droit extraordinaires). De cette première réunion de travail résulte une prise de position claire de la Confédération, qui exclut toute régularisation globale des cas concernés ainsi que toute interdiction générale des renvois par le canton de Vaud. Ainsi, le Conseiller fédéral a promis une analyse approfondie du dossier de chaque requérant et de sa situation personnelle est prévue dès la semaine prochaine et se déroulera rapidement

Avec une certaine ironie, la Coordianation Asile Vaud se permet de rappeler, au moment où la Confédération promet de se pencher sur les cas des Erythréens et des Ethiopiens, les faits suivants : « …la situation dans ces 2 pays est toujours très critique. En Erythrée, plusieurs employés érythréens de la mission de maintien de la paix de l'ONU ont été arrêtés le week-end passé par les autorités. En Ethiopie, des milliers de personnes sont toujours maintenues en détention arbitraire comme l'a récemment dénoncé Amnesty International. S'exprimant sur la situation des éthiopien-ne-s, le porte -arole de l'ODM (Office fédéral des migrations) résume ainsi la situation: "si le renvoi présente un quelconque danger pour la personne, on y renonce provisoirement." Cela fait donc 10 ans que la Suisse renonce "provisoirement" à ces renvois... »

Il était une fois...

L’affaire des « 523 » requérants déboutés originaires d’ex-Yougoslavie – aujourd’hui au nombre de 240 – ainsi que les 175 Ethiopiens et Erythréens, dont l’administration fédérale n’avait pas même examiné la demande, a fait un pas en avant. En effet, le Parlement vaudois a voté à une nette majorité le 17 janvier 2006 le décret présenté par le Grand Conseil en réponse à la motion Melly, et selon lequel les requérants déboutés ne doivent plus être frappés de mesure de contrainte ou d’interdiction systématiques de travailler. Dans la foulée, le Conseil d'Etat a accepté de suspendre toute opération de renvoi. Le ministre UCD Mermoud, qui il y a quelques mois rejetait cette hypothèse, s’est engagé pour l’ouverture de nouvelles négociations avec le Département de Christoph Blocher. Pour mémoire, les autorités fédérales avaient refusé à ces requérants d’asile la régularisation sur la base de la circulaire Metzler et ce, malgré un préavis positif du canton. 

Ainsi, comme le relève Michaël Rodriguez dans l’éditorial du Courrier, il s’agit là d’un signal fort : « L’idée que le rôle des cantons ne se limite pas à exécuter aveuglément les ordres de l’administration fédérale gagne du terrain. La conscience que la Confédération n’est pas un lieu de pouvoir abstrait situé à Berne mais un édifice en évolution dont l’existence est le fait de chacun de ses membres ».