22.06.2015
L’existence, la fiabilité et la transparence des mécanismes de monitoring et de contrôle sont l’une des articulations les plus fragiles de la problématique entre droits humains et sociétés transnationales (STN). Les codes de conduite et autres efforts d’autorégulation (type Pacte mondial), tout comme les normes de l’ONU ou les Principes directeurs de l'OCDE, ne peuvent prétendre avoir une certaine efficacité que si l’on peut juger des résultats concrets et prendre des mesures si besoin est. Concrètement, cela signifie que les STN doivent accepter de soumettre les efforts consentis à des instances de monitoring et de contrôle. Ces mécanismes doivent être objectifs, indépendants, suffisamment dotés en ressources et transparents. Ils doivent également prévoir des voies de recours.
Un exemple de mécanisme: le processus de Kimberley et les diamants du sang
Les mécanismes de monitoring et de contrôle des STN sont souvent organisés à l'intérieur d'une branche économique précise. Le processus de Kimberley (du nom de la ville d'Afrique du Sud où fut conclu l'accord) propose ainsi un intéressant mécanisme pour la filière des diamants. Dans les années 90, on estimait que près de 15% du commerce mondial des diamants était constitué de diamants du sang, extraits par les STN dans des conditions déplorables et dont les profits finançaient des guerres civiles ravageuses.
Le processus de Kimberley comprend 48 Etats membres et des organisations de la société civile actives dans le commerce des diamants. Le Conseil mondial des diamants, représentant de l'industrie diamantaire, est également partie prenante du processus. Celui-ci se construit comme un système de monitoring et de contrôle de toutes les étapes de production des diamants, débouchant sur un système de certification des pierres qui garantit leur fabrication régulière. Les États et entreprises membres acceptent de recevoir la visite de «missions d'examen», constituées par un groupe d'expert-e-s indépendant-e-s chargé-e-s de vérifier la conformité des modes de production avec les engagements du processus. L'industrie du diamant estime que, grâce au processus de Kimberley, la part de diamants du sang dans le commerce mondial a pu être réduite à moins de 1%.
Même s'il représente un exemple relativement réussi de mécanisme de monitoring et de contrôle des engagements des STN en termes de droits humains et environnementaux, le processus de Kimberley n'est pas exempt de difficultés. 2009 a été ainsi marquée par de fortes tensions avec le Zimbabwe, pays membre du processus, accusé de ne pouvoir assurer une production propre sur ses terres. Certains membres ont appelé de leurs vœux une suspension de la certification des diamants du Zimbabwe.
- Le processus de Kimberley
Site officiel du processus de Kimberley - Le système de certification du processus de Kimberley (pdf, 16 p.)
Document officiel du système de certification approuvé par les États membres du Processus de Kimberley, 2002 (entré en vigueur en 2003) - Liste et documents des «missions d'examen» du processus de Kimberley
Documentation sur le site officiel du processus de Kimberley - Les diamants de la guerre se paient en vies humaines
Perspective critique d'Amnesty International Suisse, août 2011 - Diamants du sang: le processus Kimberley a échoué
Article sur humanrights.ch, 18 décembre 2011 - Blood Diamond, ou comment les diamants financent la guerre
Article sur humanrights.ch, 10 juin 2009
Autres systèmes de monitoring
Dans certains secteurs économiques, de nombreux efforts ont été déployés au cours des dernières années pour essayer de mettre en place des systèmes de monitoring efficaces et dignes de foi. En voici deux exemples:
Secteur de l’industrie militaire et de la sécurité privée
- Un code de bonne conduite contraignant pour l'industrie de la sécurité privée
Article de humanrights.ch, 22 juillet 2015
Secteur énergétique et des matières premières
- Voluntary Principles on Security and Human Rights (en anglais)
Site officiel de l’organisation