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Vitol: encore une multinationale basée en Suisse qui ne respecte pas les droits humains

01.09.2015

Dans un rapport publié le 24 août 2015, les œuvres d’entraide Pain pour le prochain et Action de Carême montrent du doigt une multinationale basée en Suisse, Vitol, qui a passé un contrat d’exportation exclusif avec une entreprise dont les mines risquent d’aboutir à de graves violations des droits humains en Afrique du Sud, Coal of Africa Limited (CoAL). 

Alors que Vitol conteste avoir une quelconque influence ou responsabilité vis-à-vis de son partenaire incriminé, les œuvres d’entraide rappellent que le devoir de diligence s’applique à l’ensemble des relations commerciales et dépend bien du risque qu’une entreprise pose en matière de droits humains. À l’unisson avec la société civile, elles exigent des règles contraignantes pour les multinationales ayant leur siège en Suisse au lieu d’accords volontaires. Les deux œuvres d’entraide font partie, avec humanrights.ch, des quelque 70 organisations qui ont lancé l’initiative pour des multinationales responsables en avril 2015 (voir notre article sur l’initiative).

Une entreprise sous le feu de la critique

Vitol a passé un contrat  durant huit ans avec CoAL, faisant de Vitol « l’exportateur exclusif pour le charbon à l’exportation » de CoAL. Or les projets de CoAL concernant les mines de Vele et de Makhado, au nord de l’Afrique du Sud, comportent d’importants risques et suscitent de nombreuses craintes. Dans le premier cas, à Vele, «l’extraction de charbon menace au moins 5650 emplois» déclarent les ONG. Alors que CoAL a reçu en 2010 une très forte amende pour avoir violé les conditions des licences d’eau de la mine de Vele, la réouverture du site est susceptible de violer le droit à l’eau et de menacer 5650 emplois agricoles et touristiques ainsi que le droit à la santé par la pollution résultant de la poussière provenant du transport du charbon. Dans le second cas, à Makhado, d’où seront extraits coke et houille à partir de 2018, «le village de Mudimeli sera entouré par les puits de la mine à ciel ouvert et le terril, ce qui aura un impact négatif sur l’agriculture et l’approvisionnement en eau de 3000 villageois».

Ce que demandent les œuvres d’entraide à Vitol

S’appuyant sur les Principes directeurs de l’ONU sur les entreprises et les droits humains, les associations en appellent à Vitol, acheteur du charbon de CoAL, «pour exercer son levier afin de prévenir ou réduire les impacts négatifs sur les droits humains qui peuvent être causés par CoAL». 
Mais la compagnie genevoise refuse de reconnaître qu’elle a une responsabilité, argumentant qu’elle ne détient pas une grande participation en termes d’actionnariat dans l’entreprise CoAL (1.4%). «Alors que le devoir de diligence s’applique à l’ensemble des relations commerciales et dépend du risque qu’une entreprise pose en matière de droits humains, Vitol argumente comme si le devoir de diligence ne dépendait que de la participation ou des actions qu’une firme a dans une autre», indique Chantal Peyer, cheffe d’équipe chez Pain pour le prochain. Vitol nie par ailleurs toute obligation de transparence sociale en tant qu’entreprise privée. «Vitol affirme suivre l’EITI (Executive Industries Transparency Initiative) et adhérer au UN Global Compact et avoir adopté un code de conduite, reprend Chantal Peyer, mais elle refuse de publier quoi que ce soit de public à ce sujet. De plus, elle n’est membre officiel d‘aucune de ces initiatives. Vitol veut donc aborder la transparence des paiements et les débats sur les droits humains derrière des portes closes, sans avoir à communiquer. Cela montre à quel point ils ont encore un long chemin à faire au niveau de la transparence et du dialogue social».

Sources