09.01.2015
Dans un arrêt important de fin octobre 2014, le Tribunal fédéral (TF) confirme qu'un enfant de 12 ans peut changer de nom de famille pour prendre le nom de jeune fille de sa mère, détentrice de l'autorité parentale. Le TF adapte ainsi sa jurisprudence datant de 1995 aux standards de la nouvelle loi sur le nom de famille entrée en vigueur en 2013 (voir notre article sur le sujet). Auparavant, l'autorité du canton de domicile pouvait autoriser une personne à changer de nom, s’il existait de justes motifs. Depuis 2013, les exigences sont maintenant réduites à demander des motifs légitimes pour permettre un changement de nom (article 30 du Code Civil).
Concrètement, La nouvelle législation de 2013 permet aux enfants de parents divorcés, capables de discernement, de changer de nom lorsque leur souhait de faire coïncider leur nom avec celui du parent qui détient l'autorité parentale est démontré. Par ailleurs, les enfants dès douze ans peuvent désormais agir seuls dans le cadre d'une requête en changement de nom, dans la mesure où le Tribunal reconnaît en ceci un droit strictement personnel de l’enfant au sens de l’article 19C du Code civil. Ce faisant, le TF reconnait aux enfants la capacité de discernement légal à partir de 12 ans.
Contexte de l’arrêt
Les parents de la jeune requérante ont divorcé peu après sa naissance en 2001. L'autorité parentale a été confiée à la mère, qui a repris son nom de jeune fille. L'enfant vit depuis sa naissance avec sa mère et a toujours été désignée sous le nom de famille de celle-ci. En 2002, la mère fit une première tentative juridique de changement de nom pour sa fille, refusée par les autorités cantonales. En 2013, suite au changement de législation, les autorités cantonales thurgoviennes ont autorisé l'enfant à changer de nom pour prendre celui de sa mère. C’est suite au recours déposé par le père, qui arguait du manque de maturité de sa fille, que le TF a été amené a tranché en dernière instance.
Commentaire de humanrights.ch
La décision du Tribunal fédéral est à saluer du point de vue des droits humains. Les juges de Mon-Repos ont placé le bien-être de l’enfant au centre de leurs considérations et permis à une enfant disposant de la capacité de discernement de faire elle-même valoir son droit à décider de son nom.
Dans le cas de parents divorcés, un changement de nom peut cependant, sous certaines conditions, aussi mener à un éloignement supplémentaire entre l’enfant et le parent qui n’en a pas la garde. Le TF a bien pris ce point en compte, dans la mesure où il a largement appuyé sur les raisons individuelles amenées par l’enfant et fait peser son intérêt supérieur dans la balance.
L’on peut de fait facilement comprendre le besoin d’un enfant de porter le nom du parent auprès duquel il vit le plus souvent. C’est ce qu’a fait le TF en reconnaissant ce motif comme étant légitime, critère qui suffit d’après le nouveau droit en vigueur pour autoriser le changement de nom. Concernant le droit de l’enfant d’être entendu dans les décisions qui le concernent, cet arrêt du TF est également fondateur. Le Tribunal reconnait en effet qu’un enfant de douze ans peut être considéré comme capable de discernement afin d’exercer son droit à changer de nom. Il ne dit cependant pas si cette limite d’âge (12 ans) est fixe ou si elle peut variée selon les cas individuels.
Sources
- ATF 5A_334/2014 concernant un changement de nom
Tribunal fédéral, 23 octobre 2014 - Confirmation du changement de nom d'un enfant selon le nouveau droit
Communiqué de presse du TF, 24 octobre 2014