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Droit à l’éducation pour les enfants en situation de handicap: un long chemin encore vers l’inclusion

01.11.2022

L’intégration des élèves en situation de handicap à l’école obligatoire va de l’avant en Suisse, mais des obstacles entravent toujours la mise en œuvre de leur droit à l’éducation. Si leurs besoins spécifiques sont aujourd’hui mieux pris en compte dans l’enseignement ordinaire, ces enfants continuent toutefois d'être désavantagé·e·x·s dans leur parcours scolaire.

Contribution de la Law Clinic de l’Université de Genève (Juliette Aeschlimann, Sarah Conde Pombo, Sophie Oltramare, Amal Ounali)

Deux notions importantes gravitent autour de l’éducation pour les enfants en situation de handicap: l’inclusion et l’intégration. L’inclusion suppose que les enfants n’ont pas besoin de s’adapter individuellement au système éducatif et scolaire, mais que c’est ce système qui s’adapte à leurs besoins. L’intégration implique quant à elle l’adaptation des enfants au système prédéfini, et en cas de difficulté, la mise en place d’aménagements pour aider un enfant sans pour autant changer tout le système. Aujourd’hui, la Suisse donne le droit aux enfants d’être intégré·e·x·s, mais non pas incluse·x·s.

Du fait de la politique d’intégration menée en Suisse, de plus en plus d’élèves ayant des besoins éducatifs particuliers en raison d’un handicap suivent une scolarisation intégrative. Aussi, depuis une quinzaine d’années, ces enfants bénéficient de façon croissante de soutien dans le cadre de l’enseignement régulier: plus de la moitié des élèves bénéficiant d’une mesure renforcée de soutien scolaire sont aujourd’hui intégré·e·x·s dans une classe ordinaire, 6% reçoivent un soutien dans une classe spéciale et 41% dans une école spécialisée. Le nombre d’enfants et d’adolescent·e·x·s fréquentant des établissements spécialisés n’a cependant pas baissé pour autant selon le Rapport alternatif de 2017 à la Convention sur les droits des personnes handicapées (p. 107) et l’école inclusive reste encore un objectif lointain.

La Suisse dispose de plusieurs fondements juridiques pour garantir le droit à l’éducation pour tou·te·x·s, mais leur application n’est pas satisfaisante. Selon Inclusion Handicap, nombreuses sont les autorités qui ne respectent pas l'obligation découlant de la Loi sur l'égalité des personnes en situation de handicap (LHand), qui promeut notamment l'intégration des enfants en situation de handicap dans l'école ordinaire. Alors que la LHand a pour objectif une harmonisation au plan fédéral, les conditions de scolarisation sont inégales au niveau cantonal. Ces dernières dépendent encore largement de la volonté du personnel enseignant, dont la formation est lacunaire, ainsi que du financement des mesures scolaires octroyé par chaque canton selon leur budget annuel. Aussi s’agissant de Genève en particulier, une enquête menée dans les écoles du canton en 2021 a montré que le Département de l’instruction publique n’avait notamment pas les moyens d’offrir un accompagnement spécialisé, en école ordinaire, pour les élèves qui en ont besoin et y ont droit.

Un droit à la formation mais pas à l’inclusion

La Constitution garantit le droit à un enseignement de base suffisant et gratuit (art. 19 Cst.), garantie qui doit être lue conjointement à l’interdiction de discrimination (art. 8 al. 2 Cst.), selon laquelle nul·le ne doit subir de discrimination du fait d’une déficience corporelle, mentale ou psychique. Pour sa part, la LHand vise à créer des conditions propres à faciliter, pour les personnes en situation de handicap, la participation à la vie de la société, en les aidant notamment à être autonomes dans l’accomplissement d’une formation (art. 1 LHand). À ce titre, les cantons, responsables de l’instruction publique (art. 62 al. 1 Cst.), sont tenus «d’encourager l’intégration» des enfants et adolescents en situation de handicap dans l’école régulière «par des formes de scolarisation adéquates» pour autant que cela serve le bien de l’enfant ou de l’adolescent concerné (art. 20 LHand). En revanche, il n’existe pas de droit fondamental à l’enseignement à domicile. Toutefois, bien qu’il soit possible d’obtenir une autorisation pour ce type d’enseignement, les conditions sont assez restrictives. Ce n’est donc pas encore une réelle alternative accessible à tou·te·x·s.

Par ailleurs, en ratifiant la Convention sur les droits des personnes handicapées (CDPH), la Suisse s’est également engagée à mettre en place un système d’éducation basé sur l’égalité des chances, qui promeut l’insertion scolaire et permet une participation effective des personnes en situation de handicap (art. 24 CDPH). Aussi, bien que cette disposition ne soit qu’une ligne directrice pour les réglementations internes sur le plan national et qu’elle ne puisse donc pas être directement invoquée par des particuliers comme leur donnant un droit propre, les cantons sont tenus d’offrir des aménagements individualisés aux enfants qui en ont besoin. Conclu antérieurement à la CDPH, l’Accord intercantonal sur la collaboration dans le domaine de la pédagogie spécialisée (AICPS) vise également à garantir l’égalité de traitement. Cet accord affirme que «les solutions intégratives sont préférées aux solutions séparatives, ceci dans le respect du bien-être et des possibilités de développement de l’enfant ou du jeune concerné et en tenant compte de l’environnement et de l’organisation scolaires» (art. 2 let. b AICPS). Toutefois, seuls 16 cantons sur 26 ont ratifié ce concordat.

Enfin, en tant qu’État partie, la Suisse doit respecter les dispositions prévues par la Convention des droits de l’enfant (CDE), notamment l’intérêt supérieur de l’enfant (art. 3 al. 1 CDE) ainsi que la responsabilité, le droit et le devoir qu’ont les parents de donner à l’enfant, d’une manière qui correspond au développement de ses capacités, l’orientation et les conseils appropriés à l’exercice des droits que lui reconnaît la Convention (art. 5 CDE). Le Comité des droits de l’enfant observait en 2015 une «inclusion insuffisante de ces enfants dans le système éducatif ordinaire dans tous les cantons, et le manque de ressources humaines et financières allouées en vue d’assurer le fonctionnement adéquat d’un système éducatif inclusif dans la pratique.» (Observations finales sur les 2ème à 4ème rapports de la Suisse, p.13).

Ainsi, bien que la Suisse se soit engagée, tant sur le plan national qu’international à privilégier la scolarisation ordinaire avec des mesures d’adaptation et de soutien (LHand, CDPH, CDE), des différences notables persistent entre les cantons et les établissements, les modalités concrètes de l’offre de prestations de pédagogie spécialisée durant la scolarité obligatoire étant définies par les cantons (art. 62 al. 3 Cst.).

Le Tribunal fédéral a confirmé la préférence de la scolarisation inclusive (arrêt 2C_154/2017 et ATF 138 I 162). Cependant, les juges ont conclu que le fait de scolariser un·e enfant dans une filière spécialisée ne constitue pas en soi une violation du principe de non-discrimination et de la priorité de l’inclusion. Pour Mon Repos, une inégalité de traitement peut se justifier dans le domaine scolaire, car chaque enfant doit pouvoir être scolarisé dans une école adaptée à ses facultés intellectuelles. Le Tribunal fédéral a par ailleurs confirmé le fait qu’une scolarisation optimale des enfants en situation de handicap ne peut pas être exigée de l’État, compte tenu notamment des capacités financières limitées de ce dernier (arrêt 2C_264/2016, consid. 2.2; arrêt 2C_405/2019, consid. 4.2). Toutefois, en 2014, la Haute Cour a rendu un arrêt confirmant que le droit constitutionnel à la gratuité de l'enseignement n'autorise pas à mettre à la charge des parents une participation aux coûts dès lors que l’intégration de leur enfant en classe ordinaire a été considérée comme le meilleur projet pédagogique. Les bases légales et leur interprétation par les tribunaux garantissent ainsi le droit à un enseignement de base suffisant mais pas de droit à un enseignement optimal, qui implique l’existence de structures éducatives répondant aux besoins sociaux et individuels des enfants et adolescent·e·x·s dans leur diversité, y compris les personnes en situation de handicap. Si l’intégration est un droit justiciable, l’inclusion, elle, ne l’est pas.

Accès aux écoles: une première difficulté

En Suisse, plusieurs systèmes d’enseignement cohabitent. La première difficulté pour les familles avec un·e enfant en situation de handicap est de trouver la voie la plus adaptée en fonction des structures cantonales existantes. Le système de scolarité publique dualiste est composé de l’enseignement ordinaire et spécialisé. Il n’existe cependant actuellement aucune stratégie en place pour assurer un système éducatif inclusif à tous les niveaux, le système étant, au contraire, basé essentiellement, si ce n’est entièrement, sur l’intégration (rapport alternatif CDPH, p. 104). À cela s’ajoute le fait que tous les cantons ne disposent pas de classes spécialisées au sein de l’école ordinaire, destinées à accueillir un nombre réduit d'élèves pour lesquel·le·x·s suivre les cours dans la classe régulière n’est pas adapté. Lorsque de telles classes n’existent pas, les enfants seront scolarisé·e·x·s en école spécialisée avec le risque qu’ils/elles soient éloigné·e·x·s de leurs domiciles et coupé·e·x·s de la vie sociale du voisinage. En parallèle au système scolaire public, il existe également la possibilité de scolariser un enfant à la maison ou de l’inscrire dans une école privée, avec toutefois les limites que nous mentionnons (cf. supra).

Ces difficultés peuvent être illustrées par l’exemple du canton de Berne qui, jusqu’en 2019, imposait aux parents de chercher eux/elles-mêmes une place pour leur enfant dans les structures pour élèves en situation de handicap, dépendantes de quatre directions différentes Depuis, une réforme a été menée pour favoriser l'inclusion, des meilleurs salaires pour les enseignant·e·x·s spécialisé·e·x·s, et pour soulager les parents d'élèves aux besoins spécifiques, afin de respecter le principe de l'égalité des chances. Berne est ainsi le dernier canton à regrouper tous les types de formations sous le toit de l’instruction publique.

Une fois la structure scolaire décidée, encore faut-il pouvoir y inscrire son enfant. En effet, intégrer une école ordinaire ne va pas de soi: l’obtention du soutien nécessaire pour l’enfant implique que son handicap ait été attesté et reconnu. Or, les procédures pour cette reconnaissance dépendent du canton ainsi que du type de handicap. À Genève, l'attestation d’un·e·x spécialiste peut suffire dans certains cas, alors que dans d’autres il faut obtenir une attestation supplémentaire du secrétariat de la pédagogie spécialisée (SPS). Ces procédures de reconnaissance peuvent également avoir comme conséquence la privation de l’accès à l’école ordinaire. À titre d’illustration, la législation du canton d’Argovie prévoit qu’un enfant qui aurait besoin de plus de 18 heures d’assistance par semaine devrait automatiquement être scolarisé·e·x dans une institution spécialisée; une solution de scolarisation en école ordinaire serait alors directement écartée (rapport alternatif CDPH, p. 107).

D’autre part, les conditions d’accès aux écoles spécialisées sont elles aussi compliquées à saisir pour les familles d’enfants concerné·e·x·s. En effet, les principes applicables sont souvent accompagnés d’exceptions. Genève par exemple possède des conditions d’accès strictes, qui sont ancrées dans la Loi sur l’instruction publique genevoise (art. 30 LIP/GE) ainsi que dans l’AICPS (art. 3 AICPS). Ainsi, la scolarisation dans le système spécialisé ne sera admise que s’il est impossible pour l’enfant de suivre l’école ordinaire, même avec l’aide de mesures raisonnables, en raison de ses besoins éducatifs particuliers (art. 3 let. a et b AICPS); si son domicile est à Genève (avec quelques exceptions, art. 30 LIP/GE); et si l'enfant à moins de 20 ans révolus.

En outre, l’offre des écoles spécialisées diffère sensiblement d’un canton à l’autre, certains allant même jusqu'à recourir à des placements extra-cantonaux pour satisfaire les besoins de leurs ressortissant·e·x·s. En effet, les établissements spécialisés sont souvent complets dans certains cantons, comme celui de Berne qui manque de places (rapport alternatif CDPH, p. 108). À cela s’ajoute le fait que dans plusieurs cantons, notamment en Suisse romande, le coût de la scolarité dans une structure spécialisée est trop élevé, les contributions financières demandées aux parents d'enfants en situation de handicap pouvant atteindre CHF 137.- par jour, alors qu'elles ne devraient pas dépasser CHF 16.-. Pourtant, la Constitution garantit le principe de la gratuité de l'enseignement (art. 19 Cst.), principe qui se doit d’être appliqué autant pour les écoles ordinaires que les écoles spécialisées. Ainsi, demander aux parents une contribution excessive pour l’hébergement et la prise en charge de leur enfant est une pratique contraire au droit.

Dans certains cas, l’école à domicile peut constituer une solution favorable au développement de l’enfant en situation de handicap, permettant aux parents d’assurer un enseignement adapté à ses besoins. Cette option reporte toutefois tout le poids de l’éducation sur les familles. De plus, cette solution n’échappe pas, elle non plus, à son lot de formalités administratives, les parents devant soumettre une demande d’autorisation à l’autorité cantonale compétente. La procédure pour y accéder, qui doit être répétée chaque année, est complexe et n’est pas accessible à toutes les familles. Par exemple, dans le canton de Vaud les parents doivent disposer au minimum d’un CFC ou d’un diplôme du secondaire II. Plus strictes encore, les cantons de Fribourg et du Valais exigent des parents qu’ils/elles possèdent un titre d’enseignant·e·x pour instruire leurs enfants.

Quant aux écoles privées, elles peuvent également constituer une option pour bénéficier d’un meilleur encadrement et du soutien nécessaire pour l’enfant en situation de handicap, mais elles sont loin d’être financièrement abordables pour tou·te·x·s. Aucun droit à l’enseignement privé individuel ne découle de l’art. 19 Cst. (ATF 146 I 20, consid. 4.2), ce qui implique que face à un refus du département chargé de l’instruction d’octroyer l’autorisation, l’enfant devra intégrer l’enseignement ordinaire ou spécialisé.

Le défi des aménagements

La question des aménagements en école ordinaire est centrale au débat sur l’inclusion des enfants et adolescent·e·x·s en situation de handicap en formation. En effet, un certain nombre d'élèves en situation de handicap sont scolarisé·e·x·s en école spécialisée alors qu’ils/elles pourraient fréquenter une école régulière si un accompagnement pédagogique adéquat leur était fourni (rapport alternatif CDPH, p. 105). Pourtant le fait de recevoir des aménagements raisonnables nécessaires à son éducation est un droit qui découle de plusieurs principes juridiques ancrés tant en droit suisse qu’international, notamment à travers l’interdiction de discrimination (art. 2 et 5 CDPH et art. 8 al. 2 Cst.), le droit à l'enseignement (art. 19 Cst.) et le principe de proportionnalité (art. 36 al. 3 Cst.). Le Tribunal fédéral a par ailleurs affirmé que les besoins particuliers de l’enfant déterminent la solution «juste», dont on ne peut s’écarter que dans la mesure où un intérêt public prépondérant l’exige (ATF 141 I 9, consid. 5). Toutefois, selon les juges, les coûts des aménagements font partie de l’intérêt public à prendre en compte. Ainsi, lorsqu’il serait trop coûteux de mettre en place l’aménagement dont aurait besoin l’élève en école ordinaire, il/elle sera placé en école spécialisée.

Le but des aménagements est de compenser les inégalités créées par le fait d’avoir un système scolaire standardisé conçu pour un enfant sans handicap. Les aménagements s’inscrivent donc dans une logique qui reste peu inclusive. En parallèle aux aménagements, il est aussi possible d'obtenir en classe ordinaire des mesures de pédagogie spécialisées, bien qu'initialement prévues pour être octroyées uniquement en école spécialisée. L’obtention, la mise en place et le choix de ces soutiens n’est pas sans obstacles. Dans son rapport alternatif présenté au Comité de l’ONU relatif aux droits des personnes handicapées, Inclusion Handicap critique que les dispositions qui pourraient être mises en place pour soutenir les élèves en situation de handicap, en particulier la compensation des inégalités et leur financement sont refusées à tous les niveaux. En effet, les enseignant·e·x·s, les parents et leurs pair·e·x·s font souvent preuve de réticence face aux aménagements qui pourraient aider un enfant en difficulté. Cela est d’autant plus le cas lorsque le handicap n’est pas visible, par exemple dans les cas de dyslexie ou d’hyperactivité (rapport alternatif CDPH, p. 105).

S’ajoute à la question des aménagements celle de l’encadrement professionnel pour rendre ces dispositifs effectifs. En effet, bien que les aménagements soient prévus par des normes et des règlements, leur bon déroulement dépend encore trop souvent de la prédisposition des enseignant·e·x·s et des moyens dont disposent ou allouent les écoles, ce qui soulève des questions d’égalité de traitement. Actuellement, la formation des enseignant·e·x·s des établissements ordinaires est encore trop peu développée, alors que les auxiliaires de vie scolaire et enseignant·e·x·s spécialisé·e·x·s sont des éléments essentiels pour aider les élèves à besoins particuliers. Le canton de Fribourg a, pour sa part, bien compris cette nécessité en intégrant, en 2018, les auxiliaires de vie scolaire et enseignant·e·x·s spécialisé·e·x·s dans sa Loi sur la pédagogie spécialisée (art. 6 LPS/FR).

Les difficultés entourant la mise en place d’aménagements ont eu pour conséquences qu’en novembre 2021 à Genève, 155 élèves inscrit·e·x·s à l’école ordinaire ne recevaient pas le soutien nécessaire à leur développement, soutien auquel ils/elles ont légalement droit. Or «pour les élèves qui sont dans des classes régulières et ne reçoivent pas l’accompagnement adéquat, les répercussions sont monstrueuses. Le système les met d’emblée en échec» relève Marjorie de Chastonay, députée au Grand conseil et présidente de la Fédération genevoise des associations de personnes en situation de handicap et de leurs proches. Le constat est donc le suivant: les parents qui ont les moyens placent leurs enfants dans le système scolaire privé, et les enfants moins favorisé·e·x·s sont réorienté·e·x·s vers l’école spécialisée, duquel un retour au système ordinaire est très difficile.

Une école plus inclusive mais un manque de moyens

Si le rapport alternatif 2017 de mise en œuvre de la CDPH concluait alors que la Suisse était encore loin de l’inclusion, quelques projets cantonaux tendent aujourd’hui vers davantage d’inclusivité. Lucerne fait figure de modèle pour avoir supprimé les classes à effectif réduit et ordonné que les enfants concerné·e·x·s soient soutenu·e·x·s dans une école ordinaire. En Valais, des enseignant·e·x·s spécialisé·e·x·s secondent désormais le personnel enseignant dans les classes d’écoles régulières qui intègrent les élèves à besoins spécifiques. Enfin, dans le canton de Vaud le «Concept 360°» vise à mieux intégrer dans les classes des établissements ordinaires les élèves en situation de handicap dès 2022, les premières mesures dans le domaine socio-éducatif ayant déjà été mises en place dans certains établissements.

Le manque de moyens à disposition des écoles ordinaires reste cependant un problème dans de nombreux cantons. Dans le canton de Genève, les enfants atteint·e·x·s d’autisme, de troubles de l’attention ou du langage ou encore de cécité, et nécessitant la mise en place d’un suivi personnalisé par l’Office Médico-Pédagogique (OMP) sont de plus en plus nombreux·euses. En effet, selon le Département de l’Instruction Publique genevois, entre 2016 et 2020, les demandes d’enseignement spécialisé ont grimpé de 8% et celles concernant les soutiens en classe ordinaire de 415%, augmentation à laquelle le Département n’arrive pas à faire face.

Ce manque de moyens inquiète les syndicats genevois, ce d’autant plus que plusieurs enquêtes font ressortir que les enseignant·e·x·s de classes regroupant des élèves ayant des besoins particuliers sont plus à risque d’épuisement que les enseignant·e·x·s de classe ordinaire. Pourtant, la participation des enfants en situation de handicap à l’école ordinaire et le succès de leur scolarisation dépendent en grande partie de la motivation et de l’attention que leur portent les enseignant·e·x·s (rapport alternatif CDPH, p. 108).

Le regard que portent par ailleurs certain·e·x·s acteur·trice·x·s du domaine éducatif, notamment les directions d’établissements, peut également porter atteinte au droit à l’éducation d’enfants concerné·e·x·s. Un arrêt genevois de 2019 (ATA/35/2019) démontre que la stigmatisation dont a été victime un élève était «représentative de l’attitude des enseignants et de la directrice à [son] égard».

Il est donc nécessaire de développer, au sein des établissements scolaires des facteurs de protection, notamment en impliquant la direction de l’école, en formant les enseignant·e·x·s à la différenciation pédagogique et en développant la collaboration entre les enseignant·e·x·s ordinaires et les pédagogues spécialisé·e·x·s (analyse, pp. 65-67). Quand elle est mise en échec par des moyens insuffisants, l’école inclusive reste un mirage et produit tant de l’exclusion chez les enfants que des burn-out chez le personnel enseignant.

L’inclusion des enfants en situation de handicap est essentielle. Elle permet non seulement une meilleure acceptation sociale, mais aussi une augmentation des chances de poursuivre une formation et d’obtenir un emploi par la suite.

Enfin, outre les nombreuses mesures concrètes à prendre dans le domaine scolaire afin d’atteindre les objectifs auxquels la Suisse s’est engagée, il est essentiel de sensibiliser à l’importance de l’inclusion dès le plus jeune âge: une école inclusive étant le premier pas vers une société inclusive.

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