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Geste de la Suisse pour la fermeture de Guantanamo ?

21.09.2009

Une délégation suisse, avec des représentants de plusieurs départements fédéraux et des cantons, s'est rendu à Guantánamo en août 2009. C'est ce qu'a annoncé le Sontagszeitung le 20 septembre 2009, confirmé par le porte-parole du Département fédéral de justice et police (DFJP). Selon le journal, la délégation avait pour but de sonder quels prisonniers innocents de tout soupçon de terrorisme pourraient être accueillis en Suisse et parle de deux Ouïghours, un Ouzbek et un Palestinien.

Les organisations de défense des droits humains saluent cette démarche: «Amnesty International salue les actions concrètes entreprises par les autorités suisses pour réaliser l’accueil humanitaire de détenus de Guantánamo», explique la porte-parole de la Section suisse d’Amnesty International. Et d'espérer que le Conseil fédéral va décider rapidement quelles personnes entrent en ligne de compte et prendre les mesures nécessaires pour leur transfert.

Décision suisse à l'étude

En janvier 2009, la Suisse s'est dit prête à étudier si - et dans quelle mesure - elle pourrait prendre en charge des réfugiés qui seraient libérés de Guantanamo. En effet, quelques heures après son investiture du 20 janvier 2009, le nouveau président des Etats-Unis Barack Obama avait demandé de suspendre, durant 120 jours, toutes les procédures en cours devant les tribunaux militaires. Le gouvernement suisse avait alors salué la volonté du président Obama de fermer dès que possible Guantanamo. Les organisations des droits humains en Suisse, elles, avaient salué cette décision du Conseil fédéral. De plus, le 22 janvier 2009, le nouveau président américain avait franchi une étape supplémentaire et extrêmement importante en signant un décret qui prévoit la fermeture du camp de Guantanamo d’ici un an.

Questions juridiques

La Suisse l’a répété dans sa déclaration du 21 janvier 2009, l'incarcération de personnes à Guantanamo est contraire au Droit public international. Pour ce qui est de son offre, le gouvernement a annoncé que ses services devaient auparavant procéder à « une analyse détaillée et minutieuse - en particulier pour ce qui relève des aspects sécuritaires et juridiques. » En effet, la fermeture de Guantanamo pose de nombreuses questions juridiques. Dans un entretien accordé au Temps, Andrew Clapham, directeur de l'Académie de droit international humanitaire et de droits humains (ADH) estime que l’une des principales questions qui se posent ici est de savoir si un certain nombre de pays, en Europe notamment, sont prêts à accorder l'asile à ces hommes, certains ne présentant aucune menace, d’autres oui.

Pour Manfred Novak, le rapporteur spécial de l'ONU sur la torture, également chargé de trouver des pays d'asile pour une partie des détenus de la base américaine, la Suisse n'aurait à accueillir que deux ou trois anciens prisonniers de Guantanamo. Selon le rapporteur, environ 200 détenus de Guantanamo seront libérés sans charge et la moitié d'entre eux doit trouver un Etat tiers pour des raisons de sécurité. Entre 60 et 80 prisonniers devraient, eux, passer devant les tribunaux américains.

A noter que l’Office fédéral des migrations  (ODM) avait rejeté en novembre 2008 trois demandes d’asile déposées par des détenus de Guantánamo, pour lesquels Amnesty International soutient actuellement un recours contre cette décision auprès du Tribunal fédéral administratif. Clapham estime que plusieurs Etat sont en train de changer d’avis à ce propos - la Suisse aussi ? Selon Novak, le  «séjour pour raisons humanitaires», qui correspond à une décision politique, pourrait être une option pour l'accueil en Suisse.

Torture

« Il faudra également trouver une solution pour les personnes ayant probablement été maltraitées; le droit international interdit d'utiliser des informations obtenues sous la torture, tout procès serait donc inéquitable, mais on ne peut garder ces gens indéfiniment sans les juger. La question des assurances diplomatiques va aussi se poser », relève Andrew Clapham. « De nombreux éléments restent flous et ne sont pas prévus par la justice américaine. Il est essentiel que ces gens soient jugés, certains attendent depuis plus de six ans sans aucune perspective. »

Documentation - septembre 2009

Documentation  - janvier 2009

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