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Le Tribunal fédéral dit non à l'interdiction du port du voile à l'école

22.12.2015

Le 11 décembre 2015, le Tribunal fédéral a rendu un arrêt qui fera jurisprudence sur la question du port du voile à l’école.  Il a rejeté un recours des autorités scolaires de la commune de St. Margrethen, dans le canton de Saint-Gall. Celles-ci étaient en litige avec les parents d'une écolière de quatorze ans, de confession musulmane, depuis août 2013 lorsque l'écolière s'était présentée en classe avec un voile islamique. La commune, qui avait édicté un règlement interdisant de se couvrir la tête, avait d’abord été désavouée par le Tribunal administratif du canton de Saint-Gall.

C'est la première fois que le TF se prononce directement sur l'admissibilité du port du voile à l’école. Il avait déjà précédemment levé une interdiction prononcée par les autorités communales de Bürglen (TG) mais avait uniquement abordé la problématique sous l'angle de la nécessité d'une base légale formelle (voir notre article sur le sujet).

Arguments du Tribunal fédéral

Comme rapporté par l’ATS, la IIème Cour de droit public du Tribunal fédéral (TF), à une majorité de quatre juges contre un, a considéré que l'interdiction du port du voile n'est pas nécessaire pour garantir un enseignement efficace.

«Porter un foulard ne rend ni impoli, ni indiscipliné», devait notamment déclarer la juge fédérale Florence Aubry Girardin. De plus, l'interdiction va à l'encontre des buts d'intégration de l'école. Elle aurait pour effet de soustraire la jeune fille à l'école obligatoire. La juge fédérale a relevé que l'interdiction du port du voile constitue une atteinte grave à la liberté religieuse. Pour qu'elle soit justifiée, il faut une base légale, mais il importe de surcroît que l'interdiction réponde à un intérêt public pertinent et que l'atteinte ne soit pas disproportionnée. Or, en l'espèce, «rien n'indique que des tensions justifieraient une telle interdiction à St. Margrethen», a souligné la juge fédérale. Elle s'est aussi référée à un article du constitutionnaliste Jean-François Aubert pour qui «le port du voile n'empêche nullement d'apprendre».

Multiples réactions

L’ATS a également relevé de multiples réactions vis-à-vis de cet arrêt d’importance. Le maire de St. Margrethen, Roger Trösch, campe malgré tout sur ses positions: le voile est un «obstacle à l'intégration», réagit-il dans un communiqué. Pour Walter Wobmann (UDC/SO), coprésident du comité d'initiative pour l'interdiction de la burqa à l'échelle suisse, le signal lancé par le TF est catastrophique. «Cela montre que ces gens ne doivent pas du tout s'intégrer et peuvent disposer d'un régime d'exception». S'il y a un règlement d'école, tout le monde doit s'y conformer (…). Sinon, il faut accepter des jeunes en casquettes pendant les cours, au nom de l'égalité de traitement, estime le politicien. Il rappelle que l'initiative lancée en septembre porte uniquement sur l'interdiction de se voiler le visage et pas sur les couvre-chefs.

À l’inverse, la communauté scolaire tout comme le Département cantonal de l'éducation dirigé par Stefan Kölliker (UDC), se disent toutefois satisfaits que la situation légale sur le sujet ait été clarifiée. Le ministre va pouvoir répondre à trois motions demandant de fixer les règlements vestimentaires dans la loi sur l'école publique.

Enfin Montassar BenMrad, président de la Fédération d'organisations islamiques de Suisse (FOIS), s'est réjoui de la décision du TF fondée sur des articles constitutionnels. «Cela permet de renforcer la confiance dans les institutions fédérales dans ce genre de situation», a-t-il déclaré à l'ats.

Sources