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Initiative pour des multinationales responsables

L'argumentaire

04.11.2019

Des entreprises basées en Suisse sont impliquées dans des violations des droits humains et des atteintes à l'environnement dans le monde entier. Déposée en octobre 2016, l’initiative pour des multinationales responsables demande des règles contraignantes pour qu’elles puissent être tenues responsables de violations de ces droits le cas échéant.

Le texte suivant rassemble divers arguments exposant la nécessité de cette initiative du point de vue des droits humains: les entreprises qui commettent un dommage doivent en assumer les conséquences, ce qu’elles ne font pas aujourd’hui. Les principaux événements et dates qui jalonnent le parcours de l'initiative sont présentés dans la chronologie. Le contexte permettant de comprendre l’émergence de cette initiative est détaillé dans l’«Essentiel en bref».

OUI parce que l’autorégulation des entreprises ne suffit pas

Aujourd'hui, les entreprises transnationales peuvent utiliser divers instruments pour orienter leurs activités économiques de manière à respecter les droits humains et l’environnement si elles le souhaitent. Elles peuvent notamment s’appuyer sur les Principes directeurs des Nations Unies relatifs aux entreprises et aux droits de l'homme et sur les Principes directeurs de l'OCDE à l'intention des entreprises multinationales. A ce jour, les entreprises ne sont pas obligées d’utiliser ces instruments. Ne les utilisent donc que celles qui le désirent, avec pour conséquence les innombrables violations des droits humains et atteintes à l’environnement aussi scandaleuses que bien documentées.

Malgré cela règne en Suisse la conviction selon laquelle les mesures prises volontairement par les entreprises suffisent pour assurer la protection des droits humains et la préservation de l’environnement dans le monde. La situation actuelle est la preuve que la stratégie d'autorégulation des entreprises n’a jusqu’à maintenant pas fonctionné.

Pourtant, le Conseil fédéral rejette la nécessité d’instaurer des normes légales explicites. Il attend des entreprises basées en Suisse qu’elles assument leur responsabilité en matière de droits humains, mais ne met en place aucun instrument juridiquement contraignant garantissant la protection des droits humains et de l’environnement. L’initiative répond à un besoin: celui de contraindre légalement les entreprises à respecter les droits humains.

OUI pour que les victimes puissent faire valoir leurs droits

De par leur position, le Parlement et le Conseil fédéral refusent aujourd’hui aux victimes de violations de leurs droits les voies de recours prévues dans les principes de Ruggie.

Ceux-ci stipulent l’obligation pour l’Etat de prévoir des voies de recours appropriées et efficaces en cas de violation des droits humains de la part des entreprises. Dans la pratique, les victimes se heurtent à de nombreux obstacles. L'initiative pour des multinationales responsables veut donc enfin combler cette lacune. Elle prévoit la réalisation de nombreuses conditions pour condamner une entreprise. Les victimes devront ainsi être en mesure de prouver en justice le préjudice subi, son illégalité ainsi que le lien de causalité.

Il existe également des obstacles institutionnels au niveau national. Le droit civil suisse est peu propice aux plaintes. Les plaintes collectives ne sont pas non plus possibles en Suisse. Ainsi, aucune incitation financière particulière ne pourrait provoquer une avalanche de plaintes en Suisse.

Avec la solution que propose l’initiative, il sera toujours difficile pour les victimes de violations des droits humains commises par des multinationales de prouver un lien de causalité entre les dommages et les actions de la multinationale concernée, mais il sera au moins possible de faire recours.

OUI à une solution proportionnée et sans bureaucratie

L'initiative pour des multinationales responsables prévoit un devoir de diligence pour les sociétés mères et leurs filiales. Les PME ne sont pas concernées par l'initiative, à l'exception des entreprises opérant dans des secteurs à haut risque tels que l'extraction et le commerce de diamants ou de cuivre.

L'initiative populaire contribue par ailleurs à ce que les entreprises qui respectent déjà les droits humains et environnementaux ne soient plus désavantagées par rapport à celles qui se soucient plus de réaliser des profits financiers que de respecter ces normes.

Le contre-projet indirect proposé par le Parlement dans le cadre de la révision du droit de la société anonyme affaiblit considérablement les points forts de l'initiative: d’une part, il limite la responsabilité aux seules grandes entreprises, excluant les PME à haut risque; d’autre part, il réduit le champ d’application de l'initiative, l’obligation de respect des droits humains et des normes environnementales ne concernant que les droits inscrits dans les traités ratifiés par la Suisse.

OUI pour que la Suisse conserve sa crédibilité

Les scandales des entreprises suisses peu regardantes en termes de droits humains faisant les gros titres menacent d’entacher la réputation de la Suisse à l’international et de lui faire perdre sa crédibilité en tant que pays défenseur mondial des droits humains. Il est donc particulièrement important que la Suisse plaide en faveur d'une protection forte des droits humains dans les domaines où ceux-ci sont menacés par des intérêts économiques. En se dotant d’instruments juridiques, la Suisse envoie un signal fort: elle ne se contente pas de promouvoir l'importance du respect des droits humains par les entreprises.

Ce faisant, elle suivrait la tendance mondiale actuelle. De nombreux projets législatifs ont en effet déjà vu le jour notamment dans le secteur des matières premières, notamment en lien avec les «minerais de conflit», pour fixer des normes obligeant les entreprises à respecter les droits humains dans leurs activités à l'étranger.

OUI à une prospérité suisse qui ne repose pas sur l’irresponsabilité et la violation des droits humains

En tant que petite économie nationale, la Suisse dépend d'entreprises transnationales qui contribuent de manière significative à la prospérité du pays grâce à leurs exportations de biens et de services ainsi que leurs activités de recherche et de développement.

Les activités économiques des entreprises suisses reposent sur des valeurs fondamentales, telles que la responsabilité envers autrui et l'environnement ainsi que la décence. Cependant, l’actualité pointe de nombreuses contradictions des multinationales vis-à-vis de ces valeurs.

L'initiative pour des multinationales responsables tient compte de ces valeurs fondamentales et veut obliger les entreprises à respecter les droits humains et les normes environnementales afin d’agir conformément aux principes éthiques appliqués en Suisse.