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Déception quand au 2ème rapport d'expert sur les transnationales

27.11.2017

Le Rapporteur spécial sur les droits de l’homme et les sociétés transnationales, l’américain John Ruggie, a présenté son deuxième rapport au Conseil des droits de l’homme (CDH) à Genève, le 28 mars 2007. Appel lancé à la bonne volonté des entreprises, ce rapport déçoit.

Contexte

Lorsqu’une multinationale s’implante dans une région, il arrive que son activité ait des répercussions dévastatrices pour les habitants de la région. Cela peut aller jusqu’à de sévères violation des droits humains, perte des terres ancestrales, appauvrissement, destruction de villages, pollution, empoisonnement, atteinte à la santé, voire menaces directes sur les populations. Si ces compagnes sont portées en justice, il leur suffit généralement de pointer que leurs activités sont conformes aux lois du pays d’accueil. Ainsi se pose la question suivante: les sociétés privées doivent-elles respecter, au même titre qu’un Etat, des conventions internationales ?

Le rapport

En août 2003, un groupe d’expert de l’ancienne Commission des droits de l’homme soumettait à la Sous-commission pour la protection et la promotion des droits de l’homme un projet de normes qui tentait de faire le point. Suite aux refus des états membres d’accepter ces normes, un Représentant spécial au Secrétariat général était nommé en juillet 2005 pour une durée de deux ans. John Ruggie (sur sa personne, voir ci-dessous) présentait son premier rapport (texte et additifs résumés, voir ci-dessous) lors de la quatrième session du Conseil des droits de l’homme (CDH).

Dans son rapport, l’expert rappelle d’abord que les Etats ont l’obligation de protéger leurs citoyens. S’il explique la responsabilité des entreprises pour les crimes internationaux et pour d'autres violations des droits de l'homme protégés par le droit international, le Rapporteur spécial fait remarquer qu’il est souvent difficile de rendre les multinationales directement responsables de dommages, au même titre qu’un individu. Mais surtout, il prône la régulation volontaire ou négociée entre partenaires pour faire respecter des codes de conduite, qu’il appelle „soft law“. Il y aurait donc, pour Ruggie, une combinaison possible entre les poursuites pénales pour violations des droits humains par les entreprises au niveau national et le rôle de la ‘soft law’ au niveau international.

Critiques

Le profil bas adopté par John Ruggie a été critiqué par nombre d’observateurs et d’organisations non gouvernementales. Pour le Centre Europe Tiers-Monde (CETIM), les propos du Rapporteur indiquent l’idée selon laquelle « les sociétés transnationales ne sont pas directement soumises au droit international et que la solution la plus appropriée est que l’Etat, avec les entreprises et la ‘société civile’ s’inspirent de quelques instruments internationaux pour établir des ‘soft law standards and initiatives’ que l’on pourrait traduire par ‘normes’ ou déclarations de principes non contraignants et autres initiatives. (…) Or, une littérature abondante démontre l’échec des déclarations de principes et autres codes volontaires, de l’autocontrôle et du contrôle ‘indépendant’ effectué par les représentants de la ‘société civile’.

Les participants à une réunion organisée par la Friedrich Ebert Stiftung le 28 mars même, ont d’une part regretté que le rapport ne mentionne même plus les normes établies par les experts de la Sous-commission ; d’autre part le rapport ne parle des victimes des multinationales qu’en termes très généraux. “Un rapporteur spécial doit collecter des informations pour permettre au Conseil de dire la réalité”, explique Yves Lador, de Earth Justice dans un entretien avec la Tribune des droits humains. “Le rapporteur doit donc parler des victimes, leur donner la parole, faire un état des lieux, poursuit-il. Il n’y a rien de cela dans le rapport Ruggie. Les victimes sont juste évoquées. Mais surtout, le rapporteur ne peut pas choisir les textes qui l’arrangent. On peut discuter de la valeur des normes établies par l’ancienne sous-commission. Mais un expert ne peut pas simplement ignorer un texte qui a fait l’objet d’un long travail collectif."

A propos du Rapporteur spécial, conditions à sa prolongation

Le Conseil des droits de l’homme avait prolongé le mandat d’expert indépendant donné par l’ancienne Commission des droits de l’homme au juriste américain John Ruggie. Professeur de droit à la Kennedy School of Governement de l’université de Harvard, il avait auparavant été l’un des maîtres d’œuvre du “Global Compact”, cet accord entre les Nations Unies et des entreprises qui s’engagent à respecter un code de conduite de manière volontaire.

Si le CoDH décidait de reconduire John Ruggie, celui-ci devrait livrer des recommandations et remédier à des sujet comme le déficit d’autorégulation volontaire, la réduction à seuls certains droits, le manque de système d’évaluation transparent et de monitoring indépendant, l’absence de mécanisme d’implémentation et de surveillance pénale. En outre, le CDH devrait engager le Rapporteur spécial à changer de perspective et à inclure d’avantage les voix des victimes des violations de droits humains par les sociétés transnationales

Documents 

Actuellement seulement disponibles en anglais, ces documents devraient être traduits en français. 

Commenataires et communiqué

Information supplémentaire

Ce sujet a fait l’objet de commentaire approfondi en allemand de Nils Rosemann pour humanrights.ch. On peut les trouver sous les rubriques suivantes :

Mais encore…

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