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Bases juridiques internationales pour la liberté de pensée, de conscience et de religion

26.09.2023

Déclaration universelle des droits humains

L’article 18 de la Déclaration universelle des droits de l’homme (DUDH) de 1948 a établi pour la première fois dans le droit international la liberté de pensée, de conscience et de religion. Ce droit implique la liberté de chacun à construire ses propres pensées et à développer sa conscience de manière autonome, sans influence extérieure.

Conventions internationales sur les droits humains

Pacte international sur les droits civils et politiques

L’article 18 du Pacte II de l’ONU garantit la liberté de pensée, de conscience et de religion. Il institue le droit d’adopter une religion ou une conviction de son choix, mais aussi d’en changer (al. 2). La religion ou la conviction peut se manifester de manière individuelle ou collective, tant en privé qu’en public. L’article 18 différencie la liberté de croyance et la liberté de manifester ses croyances: tandis que la liberté de croyance ne peut faire l’objet de restrictions, même en cas d’état d’urgence, la liberté de manifester ses croyances peut faire l’objet de restrictions prévues par la loi, notamment lorsque la sécurité ou les droits fondamentaux d’autres personnes sont menacés. De plus, le Pacte contraint les États parties à respecter la liberté des parents à élever leurs enfants selon leurs propres convictions religieuses ou morales.

Par le biais de son Observation générale n° 22, le Comité des droits de l’homme complète l’article 18 du Pacte II de l’ONU et fournit onze supports d’aide à l’interprétation. Il rappelle que l’article 18 protège, au même titre que les croyances théistes, antithéistes et athées, le droit de n’adhérer à aucune croyance ou religion. L’article ne se limite pas uniquement aux religions traditionnelles et institutionalisées, et il s’applique à des formes nouvelles et alternatives de religion. Il englobe également les formes de religion manifestées tant au niveau individuel que collectif.

Convention internationale sur l’élimination de toutes les formes de discrimination raciale (CERD)

L’article 5, lettre d de la CERD contraint les États parties à assurer la liberté de pensée, de conscience et de religion de tou·te·x·s, sans distinction de «race*», de couleur ou d’origine nationale ou ethnique.

*Le concept des «races humaines» prétendument naturelles n’existe pas. Scientifiquement indéfendable, il constitue une construction sociale qui est au cœur de l’idéologie raciste. Dans cet article, le terme «race» a été placé entre guillemets afin de souligner sa construction sociale et de permettre une analyse de l’inégalité et de la discrimination structurelles.

Convention internationale des droits de l’enfant (CIDE)

Grâce à l’article 14 de la CIDE, les enfants bénéficient aussi de la liberté de pensée, de conscience et de religion. Leurs parents ou leurs tuteur·trice·x·s disposent du droit de les guider en conséquence d’une manière qui corresponde au développement de leurs capacités.

Convention internationale sur la protection des droits de tous les travailleurs migrants et des membres de leur famille

L’article 12 de cette Convention applique l’article 18 du Pacte II de l’ONU spécifiquement à la situation des travailleur·euse·x·s migrant·e·x·s et des membres de leur famille. La Suisse n’a pas ratifié cette convention.

Convention relative au statut des réfugiés (Convention de Genève)

La Convention de Genève protège notamment les personnes réfugiées, qui fuient par peur d’être persécutées en raison de leur religion. Elle rattache l’appartenance religieuse au statut de réfugié, lequel confère des droits politiques et juridiques. La Convention de Genève ne contient volontairement pas de définition juridique de la religion, afin de protéger toutes les formes de croyance contre la persécution.

Selon le Guide des procédures et critères à appliquer pour déterminer le statut de réfugié de l’Agence des Nations Unies pour les réfugiés (HCR), certaines personnes sont non seulement persécutées parce qu’elles appartiennent à une minorité religieuse, mais d’autres le sont également parce qu’elles ne sont pas membres d’une communauté religieuse dominante. En outre, la religion peut être étroitement reliée à l’origine ethnique; certaines personnes peuvent donc être persécutées en raison de leur appartenance à une communauté, qu’elles partagent ou non les opinions religieuses de cette dernière.

La religion pouvant donc constituer un motif de fuite, l’Agence des Nations Unies explique que les demandes d’asile de cette nature constituent un défi particulier pour les autorités compétentes, qui doivent déterminer si les convictions et les pratiques religieuses sont considérées comme «essentielles et impossibles à dénoncer» pour les personnes concernées. Dans le cadre de l’examen de la demande d’asile, ce sont les informations fournies par les personnes en quête de protection qui doivent se situer au centre de l’attention, et non la transparence des comportements et des actions faisant l’objet de persécution. L’objet de la croyance en soi n’est pas déterminant: il importe que les croyances soient si essentielles qu’elles en deviennent indissociables d’une personne ou d’un groupe de personnes. Ainsi, les formes de religion manifestée tant individuellement que collectivement sont protégées. Le HCR reconnaît que la religion échappe à toute évaluation rationnelle et que la signification que celle-ci revêt pour les croyant·e·x·s ne peut être décrite de façon neutre et objective.

Instruments internationaux relatifs aux droits humains

Convention européenne des droits de l'homme

L’article 9 de la Convention européenne des droits de l’homme de 1950 contient deux alinéas relatifs à la liberté de pensée, de conscience et de religion. Le Guide sur l’article 9 de la Convention européenne des droits de l’homme rappelle que la liberté de choisir une croyance de son choix ne peut en aucun cas être restreinte. En vertu de l’article 9, alinéa 2, la liberté de manifester sa foi peut faire l’objet de restrictions s’il existe une base légale ainsi qu’un objectif légitime et que le principe de proportionnalité est pris en compte. Dans ce cas, un État peut interdire les actes liés à la pratique religieuse, les sanctionner ou les pénaliser.

Cour européenne des droits de l’homme (CrEDH)

Si la jurisprudence de la CrEDH ne s’applique qu’à des cas particuliers, elle jouit d’une forte influence. De plus, les jugements de celle-ci sont contraignants pour les États concernés. La CrEDH s’est déjà prononcée à de multiples reprises sur la liberté de religion, sur les signes et vêtements religieux et sur l’objection de conscience. Certains cas ont été cités de nombreuses fois, à l’instar de Kokkinakis c. Grèce (1993) portant sur le prosélytisme, de Şahin c. Turquie (2005) sur l’exclusion de l’université en raison du port du voile, de Osmanoğlu et Kocabaş c. Suisse (2007) sur la dispense des cours de natation, de Lautsi et autres c. Italie (2011) sur la présence de crucifix dans les salles de classe, de S.A.S c. France (2014) sur l’interdiction du port de la burqa et de E.S. c. Autriche (2019) sur la paix religieuse. La CrEDH juge parfois les cas relatifs au droit des religions de manière différente que le Comité des droits de l’homme de l’ONU, ce qui, dans ce contexte, peut créer des incertitudes quant à la mise en œuvre des droits humains.

Charte des droits fondamentaux de l’Union européenne

L’article 10 de cette Charte concerne la liberté de pensée, de conscience et de religion. Il mentionne également le droit à l’objection de conscience, lequel est reconnu selon la législation nationale qui en régit l’exercice.

Liens complémentaires: