08.11.2017
L’Union européenne (UE) a mis sur pied ces dernières décennies une politique anti-discrimination systématique. Se fondant sur sa propre expérience dans le domaine de la discrimination liée au genre, elle a ainsi adopté des mesures élargies contre la discrimination à l’égard d’autres groupes désavantagés.
Ancrage dans les traités
L’art. 13 TCE (Traité instituant la communauté européenne; version consolidée après le Traité de Lisbonne: art. 19) permet au Conseil de prendre les mesures nécessaires en vue de combattre toute discrimination fondée sur le sexe, la race ou l'origine ethnique, la religion ou les convictions, un handicap, l'âge ou l'orientation sexuelle.
L’obligation de l’UE de respecter le principe de l’interdiction de discriminer a été confirmée avec la proclamation de la Charte des droits fondamentaux de décembre 2000. Avec l’entrée en vigueur du Traité de Lisbonne du 13 décembre 2007, l’interdiction de discriminer a en outre acquis un caractère juridiquement contraignant et son champ d’application a été élargi. Ainsi, l’art. 21 de la Charte des droits fondamentaux énumère, outre les motifs évoqués à l’art. 13 TCE, les motifs de discrimination suivants: l’origine sociale, les caractéristiques génétiques, la langue, les opinions politiques ou toute autre opinion, l’appartenance à une minorité nationale, la fortune et la naissance. L’art. 21 al. 2 interdit par ailleurs explicitement toute discrimination fondée sur la nationalité.
Quatre directives centrales contre les discriminations
Il existe actuellement quatre directives qui contraignent les Etats membres de l’UE à créer et mettre en œuvre des normes légales pour combattre les discriminations et à assurer l’application du principe d’égalité de traitement:
La «directive anti-racisme» exige des Etats qu’ils luttent contre toute discrimination fondée sur la race ou l’origine ethnique dans les domaines de l’accès à l’emploi et au travail, de la formation, de la sécurité sociale et des soins de santé, ainsi que dans les domaines de l’accès aux biens et services et de la fourniture de biens et services, y compris en matière de logement.
La directive-cadre en matière d’emploi exige des Etats qu’ils luttent contre la discrimination fondée sur la religion ou les convictions, un handicap, l’âge ou l’orientation sexuelle dans les domaines de l’emploi et du travail.
La directive sur le genre interdit toute discrimination fondée sur le sexe dans les domaines l’emploi et du travail ainsi que dans le domaine de la sécurité sociale. Elle remplace entre autre la directive 2002/73/CE du 23 septembre 2002, qui précisait et élargissait la Directive 76/207/CEE du 9 février 1976.
La directive sur «l’égalité de traitement entre les femmes et les hommes en dehors du monde du travail» vise les discriminations fondées sur le sexe dans les domaines de l’accès aux biens et services et de la fourniture de biens et services.
Survol des directives
Les directives comprennent pour l’essentiel l’interdiction de toute discrimination directe et indirecte, l’interdiction de harcèlement – défini par les directives comme tout «comportement non désiré […] qui a pour objet ou pour effet de porter atteinte à la dignité d'une personne et de créer un environnement intimidant, hostile, dégradant, humiliant ou offensant» (voir art. 2 al. 3 Directive 2000/43/CE et Directive 2000/78/CE), ainsi que l’interdiction d’enjoindre une personne de pratiquer une discrimination.
Garanties en matière de protection juridique
Les directives exigent en outre des Etats de garantir une protection juridique effective. Elles prévoient tout particulièrement:
- un droit de recours pour les organisations
- le renversement du fardeau de la preuve
- la protection des victimes contre les représailles
- des sanctions effectives, proportionnées et dissuasives
Par ailleurs, les directives enjoignent les Etats membres à entretenir un dialogue avec la société civile sur la mise en œuvre de l’interdiction de discriminer ainsi que sur les engagements ancrés dans les directives. La directive anti-racisme et la directive sur l’égalité de traitement entre les sexes en dehors du monde du travail prévoient ainsi la création d’organismes spéciaux et compétents en matière de promotion de l’égalité femme-homme.
Directive supplémentaire bloquée
Le 2 juillet 2008, la Commission de l’UE a accepté une proposition de nouvelle directive sur la protection contre la discrimination fondée sur l’âge, un handicap, l’orientation sexuelle, la religion ou les convictions en dehors du marché du travail. La directive vise l’égalité de traitement dans les domaines de la protection sociale (y compris des soins de santé), de l’éducation ainsi que de l’accès aux biens et services et de la fourniture de biens et services pouvant être acquis par tous les citoyen-ne-s (y compris le logement). La proposition est cependant bloquée depuis des années en raison de l’opposition de quelques Etats de l’UE (notamment de l’Allemagne).
- Documents sur la proposition de directive de la Commission de l’UE
Site internet de la Commission européenne
Pour de plus amples informations
- Lutte contre la discrimination
Page thématique du site internet de la Commission européenne - Antidiskriminierungsforum EU
Explications sur la jurisprudence et sur d’autres thèmes (en allemand) - Arrêts de la Cour de justice de l’Union européenne (CJUE) sur le droit anti-discrimination de l’UE
Moteur de recherche CJUE - Manuel de droit européen en matière de droit de non-discimination
Agence des droits fondamentaux de l’Union européenne, de la Cour européenne des droits de l’homme et du Conseil de l’Europe de (pdf, 178 p.). - European network of legal experts in gender equality and non-discrimination
Publications sur la mise en œuvre de l’interdiction de discriminer au sein de l’UE