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Discrimination - dossier

La protection juridique de l’ONU contre la discrimination

L’interdiction de discriminer est un principe central des normes internationales en matière de droits humains. Elle a été inscrite, sur la base de la Déclaration universelle des droits de l’homme de 1948, dans plusieurs traités de l’ONU présentant pour la Suisse un caractère contraignant:

La Déclaration universelle des droits de l’homme (DUDH)

La Déclaration universelle des droits de l’homme de 1948 définit à l’art. 1 DUDH  l’égalité de droit entre les personnes et établit que «tous les êtres humains naissent libres et égaux en dignité et en droits». L’art. 2 DUDH  contient l’interdiction de discriminer et proscrit toute distinction «de race, de couleur, de sexe, de langue, de religion, d’opinion politique ou de toute autre opinion, d’origine nationale ou sociale, de fortune, de naissance ou de toute autre situation».

Pactes des Nations Unies de 1966

Les droits issus de la Déclaration universelle des droits de l’homme ont été concrétisés en 1966 avec l’entrée en vigueur de deux accords internationaux contraignants: le Pacte international relatif aux droits économiques, sociaux et culturels (Pacte I de l’ONU) et le Pacte international relatif aux droits civils et politiques (Pacte II de l’ONU). Les deux pactes contiennent une interdiction de discriminer dont la formulation se fonde sur celle de la Déclaration universelle des droits de l’homme (Pacte I de l’ONU: art. 2 al. 2; Pacte II de l’ONU: art. 2 al. 1). L’interdiction de discriminer porte sur les droits définis dans les deux pactes (interdiction de discriminer dite «accessoire»). Le Pacte II présente en outre une interdiction universelle de discriminer. L’art. 26 Pacte II de l’ONU prévoit: «Toutes les personnes sont égales devant la loi et ont droit sans discrimination à une égale protection de la loi.» La Suisse a par ailleurs émis une réserve à cette disposition et a restreint son application aux droits contenus dans le Pacte II.

L’interdiction de discriminer et le principe de l’égalité de traitement sont ancrés dans d’autres dispositions. Ainsi, les deux Pactes établissent de manière identique à l’art. 3 que les hommes et les femmes doivent être traités de manière égale dans l’exercice des droits garantis dans les Pactes. Le Pacte I de l’ONU inscrit en outre à l’art. 7 le droit de tous les travailleurs à une rémunération égale pour un travail de valeur égale sans distinction aucune, ainsi que la même possibilité pour tous d’être promus, dans leur travail, à la catégorie supérieure appropriée. Le Pacte II de l’ONU contient des clauses correspondantes à l’art. 4 (danger public exceptionnel), à l’art 23 al. 4 (égalité de droits des époux) et à l’art. 24 al. 1 (protection des enfants).

Conventions spéciales sur l’élimination de la discrimination

Deux conventions de l’ONU sont consacrées entièrement à la thématique de la discrimination : la Convention internationale sur l’élimination de toutes les formes de discrimination raciale de 1965 et la Convention sur l’élimination de toutes les formes de discrimination à l’égard des femmes de 1979. Ces deux conventions concrétisent les obligations des Etats à lutter contre les discriminations et à encourager l’égalité de traitement.

Convention internationale sur l’élimination de toutes les formes de discrimination raciale de 1965

Cette Convention interdit toute forme de discrimination raciale et enjoint les Etats à lutter de manière active contre toute discrimination existante. Elle contient pour la première fois une définition détaillée de la discrimination raciale (art. 1 al. 1 CIEFDR). Ainsi, selon les termes de la Convention, l’expression «discrimination raciale» représente «toute distinction, exclusion, restriction ou préférence fondée sur la race, la couleur, l'ascendance ou l'origine nationale ou ethnique, qui a pour but ou pour effet de détruire ou de compromettre la reconnaissance, la jouissance ou l'exercice, dans des conditions d'égalité, des droits de l'homme et des libertés fondamentales dans les domaines politique, économique, social et culturel ou dans tout autre domaine de la vie publique.»

La Convention contre le racisme contraint donc les Etats à mettre fin «par tous les moyens appropriés, y compris, si les circonstances l'exigent, des mesures législatives, […] la discrimination raciale pratiquée par des personnes, des groupes ou des organisations» (art. 2 al. 1). Les dispositions suivantes (art. 4, 5 et 6) concrétisent cette obligation pour différents domaines.

Convention sur l’élimination de toutes les formes de discrimination à l’égard des femmes de 1979

La Convention pour les droits des femmes contient une interdiction complète et universelle de discriminer à l’égard des femmes. Les hommes ne peuvent invoquer cette convention.

L’article 1 définit la discrimination comme «toute distinction, exclusion ou restriction fondée sur le sexe qui a pour effet ou pour but de compromettre ou de détruire la reconnaissance, la jouissance ou l'exercice par les femmes, quel que soit leur état matrimonial, sur la base de l'égalité de l'homme et de la femme, des droits de l'homme et des libertés fondamentales dans les domaines politique, économique, social, culturel et civil ou dans tout autre domaine.»

L’article 2 dresse une liste détaillée des obligations des Etats parties visant à éliminer la discrimination à l’égard des femmes et à atteindre l’égalité de traitement. Il enjoint ainsi les Etats parties à adopter «des mesures législatives et d’autres mesures appropriées assorties, y compris des sanctions en cas de besoin» afin de lutter contre la discrimination à l’égard des femmes (Art. 2 let. b) et à instaurer «une protection juridictionnelle des droits des femmes sur un pied d’égalité avec les hommes et [à garantir], par le truchement des tribunaux nationaux compétents et d’autres institutions publiques, la protection effective des femmes contre tout acte discriminatoire» (art. 2 let. c). Les art. 7 à 14 constituent une concrétisation de l’interdiction de discriminer pour une sélection de domaines (participation à la vie politique, droits civils, acquisition de biens et de la nationalité, santé, formation, mariage, famille, etc.)

La Convention souligne explicitement à l’art. 4 que «l’adoption par les Etats parties de mesures temporaires spéciales visant à accélérer l’instauration d’une égalité de fait entre les hommes et les femmes» ne représente pas une discrimination. Ces mesures ne doivent toutefois « en aucune façon avoir pour conséquence le maintien de normes inégales ou distinctes » et « doivent être abrogées dès que les objectifs en matière d’égalité de chances et de traitement ont été atteints.»

L’art. 5 revêt une importance particulière: il enjoint les Etats à adopter des mesures pour combattre et éliminer les représentations stéréotypées et les préjugés concernant le rôle des femmes et, partant, à éliminer les raisons essentielles des inégalités de traitement à l’égard des femmes.

Protection contre la discrimination garantie par les conventions de l’ONU relatives aux droits de différents groupes de personnes

On retrouve en outre une interdiction de discriminer dans deux autres conventions de l’ONU ratifiées par la Suisse:

Convention relative aux droits de l’enfant de 1989

Une interdiction accessoire de discriminer est inscrite à l’art. 2 al. 1 de la Convention sur les droits de l’enfant. Celui-ci enjoint les Etats parties à protéger les enfants contre «toutes formes de discrimination ou de sanction motivées par la situation juridique, les activités, les opinions déclarées ou les convictions de ses parents, de ses représentants légaux ou des membres de sa famille.»

Convention relative aux droits des personnes handicapées de 2006

La Convention relative aux droits des personnes handicapées de 2006 contient différentes dispositions qui proscrivent toute forme de discrimination (voir tout particulièrement l’art. 4 al. 1 et l’art. 5). «Afin de promouvoir l’égalité et d’éliminer la discrimination, les Etats parties prennent toutes les mesures appropriées pour faire en sorte que des aménagements raisonnables soient apportés» (art. 5 al. 3). Afin que les personnes en situation de handicap puissent avoir la chance de bénéficier d’un traitement équitable, les Etats doivent adopter certaines mesures de soutien sous la forme «d’aménagements raisonnables». L’art. 6 astreint les Etats à reconnaître que «les femmes et les filles handicapées sont exposées à des discriminations multiples» et qu’elles nécessitent donc des mesures particulières afin qu’elles puissent «jouir pleinement et dans des conditions d’égalité» des droits humains.

Survol des dispositions relatives à l’interdiction de discriminer